dimanche 27 novembre 2011

Tout le monde est nationaliste mais...

Les partis politiques de tous les horizons, ainsi que les groupuscules de la droite économique, ont une position clairement affirmée sur le plan de l'identité. Même Charest se définit comme nationaliste québécois. Ici, se revendiquer du nationalisme est un peu comme se dire humaniste ou démocrate. C'est une norme.

Je me demande même si ce ne sont pas les antinationalistes du Québec qui passent pour des hurluberlus, comme ces Américain-e-s qui ne s'affichent pas comme des true patriots.

J'ai déjà expliqué à plusieurs reprises pourquoi j'étais contre le nationalisme, cette idéologie dégoûtante et irrationnelle, qui n'a pas besoin de preuves objectives pour justifier sa fierté ridicule et sa haine de tout ce qui est différent. Le nationalisme n'en a pas besoin de preuves objectives, parce qu'il est basé sur l'émotion[1]. Et c'est par l'émotion qu'on manipule des gens et qu'on peut les convaincre de faire des choses qui vont contre leurs intérêts. Parce que s'ils ne vont pas à la guerre pour défendre leur soit-disant patrie, la honte va les dévorer. Parce que s'ils n'appuient pas les lois liberticides et les sacrifices qu'imposent l'autoritarisme, ils penseront que c'est parce qu'ils sont des traîtres à leur soit-disant Nation.

Le nationalisme, c'est le règne de la simplicité d'esprit, de l'émotion romantique, du sacrifice et de la terreur. Écoutez tous les beaux discours nationalistes d'aujourd'hui: à mille lieux de la réalité, ils se concentrent surtout sur des formules convenues et exaltantes. La Légion Nationale, un des groupuscules qui est à l'origine du rassemblement d'hier, nous en donne un bon exemple:

"Nous sommes dignes et nous resterons vrais!
Nous sommes fiers et nous resterons forts!
Nationalistes, unissons nos forces!
Agissez avant qu’il ne soit trop tard!"

C'est toujours le même schéma, surtout depuis la fin des années 90. On est à cent lieues de Gilles Vigneault et de Félix Leclerc[2]: le nationalisme n'est plus lié à un projet émancipateur. Il est porteur d'un projet menacé. Sur ce thème, tous les nouveaux nationalismes partagent le même discours. L'État (canadien) n'est plus l'ennemi. L'ennemi, c'est l'étranger/ère, l'immigrant-e qui ne partage pas les prétendues valeurs nationales, ou encore la langue.

Ces idées de valeurs pures peuvent mener à des dérives homogénéisantes. Ça veut dire, en gros, que dès qu'on admet qu'une valeur nationale ne permet aucune concession, comme l'entend Serge Ayoub[3], eh bien on ne peut permettre aucune dérogation à ces valeurs. Et si les valeurs d'une nation, c'est le mariage, la femme à la maison et l'hétérosexualité[4]? Les valeurs traditionnelles d'une nation sont rarement universelles et tolérantes, justement parce qu'elles sont centrées sur le passé, sur un groupe défini et sur la pratique à long terme. Elles ne sont pas adaptables, ni flexibles. Et ça, c'est une constante. C'est pour cela que les nationalistes sont toujours des conformistes autoritaires, malgré le statut de marginaux que revendiquent fièrement quelques groupes extrémistes. Jamais illes ne nous laisseront vivre notre vie comme on l'entend.

Mais les politicien-ne-s et groupuscules continueront toujours de brandir l'identité nationale pour mousser leur option politique. C'est généralement une manipulation plus ou moins consciente qui sert à enterrer le programme sous l'appel à la Nation. Mais chez les néonazis, comme chez leurs émules plus politiquement corrects, c'est le contraire : le programme (empruntant souvent des éléments anticapitalistes!) sert avant tout à camoufler le message ultranationaliste et raciste. Quant à leur conduite, elle est bien léchée: il s'agit en résumé de plaire à l'ordre établi, qu'ils ne veulent pas du tout troubler. Ils arrivent à se faire passer pour des gens raisonnables et parviennent ainsi à tromper beaucoup de monde.

Or, les traditions, les valeurs pures de la nation, le chauvinisme xénophobe, et surtout le sentiment d'honneur qui est au centre du projet de Nation, ça n'améliore pas votre vie. Ça l'empoisonne.

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[1] Salut aux camarades du RRQ qui sont persuadés que le discours émotionnel vaut mieux que les faits présentés de manière objective, et qui me l'ont dit ouvertement.

[2] Quelques personnes sont encore attachées à cette forme de nationalisme, qui se caractérise par sa modération exemplaire et sa meilleure capacité d'accueil. Notons que beaucoup parmi ceux-là ne s'objecteraient pas à la création d'un État pour les autochtones du Canada, quittes à amputer le territoire du Québec! J'ai quand même beaucoup de respect pour ça. Le problème, cependant, c'est que ce nationalisme est en voie de disparition et il est lui aussi graduellement affecté par la peur des étrangers/ères. Même Vigneault, qui a dit "ma maison c'est votre maison" reprend un discours basé sur la menace des autres langues et cultures qui pèse sur la culture québécoise.
[3] Ce crétin qui se dit contre l'impérialisme mais qui, 30 secondes plus tard, fait l'apologie de l'impérialisme napoléonien et de l'armée française marchant jusqu'à Moscou.
[4] L'extrême-droite de Montréal s'attaque aussi aux gays. Je cherchais d'autres sources que celle mentionnée sur l'hyperlien, mais malheureusement, les articles en question chez Lagacé ont disparu.

samedi 26 novembre 2011

des "indépendantistes"

"Un groupuscule indépendantiste qui manifestait au centre-ville de Montréal a été la cible de projectiles, pour une raison qui demeure inconnue, samedi."

Pour une raison qui reste inconnue? C'était des nazis, câlisse! Pas des matantes polies qui font du porte-à-porte pour renouveler des cartes de membres du PQ. Des nazis!

Autre traitement moche de l'évènement: "Un groupe d’une trentaine de personnes qui manifestait pacifiquement au coin de la rue Guy et du boulevard René-Lévesque aurait été attaqué par une quinzaine d’individus, selon Danny Richer, porte-parole de la police de Montréal."

Wow. Vraiment, bravo les médias. Vous faites bien votre devoir de chiens savants des forces de l'ordre. Avec de la chance, vous allez peut-être avoir un biscuit.

mardi 22 novembre 2011

Les sans-abris de la Place Victoria.

Quelques personnes se moquent des occupistes de Montréal et de leurs camarades sans-abris avec qui ils partagent leur campement. Agnès Gruda a publié, dans la Presse, un article absolument indigeste sur le sujet, dans lequel elle dit notamment que la brutalité policière a aidé les Indigné-e-s des USA à se faire de la pub. Tout le monde le sait en effet qu'on aime ça nous autres les activistes, se faire battre et mettre en prison[1].

Elle dit aussi que les Indigné-e-s de Montréal se sont piégé-e-s eux-mêmes parce que la démocratie directe, eh bien c'est médiocre parce que c'est pas assez coercitif. Voilà une analyse totalement aberrante qui témoigne bien d'une absence totale d'expérience sur le terrain. Il est évident pour moi que la démocratie directe, avec recherche de consensus et libre-association/dissociation est beaucoup plus efficace dans une petite collectivité qui vit ensemble que la tyrannie élue. Mais bon.

On suggère finalement que les SDF et drogué-e-s sont devenu-e-s plus nombreux/euses que les Indigné-e-s sur le campement. Cela suppose qu'on ne peut pas être à la fois toxico et engagé-e socialement. Cela dit, il est plausible que plusieurs personnes en difficulté aient profité de la présence des Indigné-e-s dans la rue pour un peu de chaleur et de nourriture.

Des Indigné-e-s eux-mêmes, craignant à juste titre pour leur sécurité, ont paraît-il énoncé un désaccord profond face à la présence des sans-abris. Ceux-là non plus n'ont pas compris l'importance du rôle qu'ont à jouer les indésirables dans cette histoire.

Car la présence des indésirables de notre société, le sous-lumpen-prolétariat, est une preuve de l'échec non pas des occupistes, mais de notre société de banquiers. Par leur existence, par le délaissement auquel illes sont à tout autre moment de l'année victimes, illes incarnent les faits à l'épreuve de toute réfutation démagogique. En concentrer quelques dizaines dans le centre financier de Montréal, c'est mettre à la face des capitalistes et gouvernant-e-s leur propre merde, le désastre qu'illes ont provoqué par leur comportement de sociopathes.

La droite se moque bien des Indigné-e-s maintenant. Elle dit que le Square Victoria est devenu un petit bidonville. Elle oublie de mentionner que cette misère existe même quand personne n'occupe de parc au centre-ville. Et que ce n'est pas la destruction du campement qui empêchera des gens de mourir d'une overdose ou d'être atteints de crises paranoïaques.

Les puissant-e-s doivent se rendre compte que ce que les Indigné-e-s sont en train de faire, c'est de leur montrer en plein sous les yeux les avaries du système qui ont fait d'eux des dynamiques créateurs/trices de richesse. Illes leur montrent que beaucoup de gens ne profitent en rien de ce régime antisocial.

Retenez bien ce message: il n'y a pas que la classe moyenne qui souffre!

Mise à jour: Même si je ne m'attends pas à une résistance de leur part, j'espère qu'au moment de l'expulsion devenue aujourd'hui imminente, les Indigné-e-s vont penser à faire un appel à tous et à toutes pour une manif de soutien!
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[1] Il faut du moins croire ce qu'en disent ces chroniqueurs/euses-là, qui se sont jamais fait battre ni mettre en prison.

lundi 21 novembre 2011

les tanks dans les rues, l'armée au pouvoir.

Je n'avais pas besoin de beaucoup de lucidité pour dire, il y a quelques mois:

« C'est un peu con de dire que le renversement de Moubarak fut une révolution: allumez câlisse, il y a des tanks dans les rues, LES MILITAIRES SONT AU POUVOIR! »

Maintenant que ça a recommencé à péter, parce que les militaires (représentés par la police) sont plus lents à rendre le pouvoir au peuple qu'à mettre le doigt sur la gâchette et sous la jupe des Égyptiennes qui ont le culot de contester, plusieurs commentateurs/trices, ahuri-e-s, décident de garder le silence. Le « printemps arabe » n'a définitivement plus la cote, malgré les nouvelles qui nous parviennent encore assez souvent.

Beaucoup se taisent et attendent, même des universitaires et des spécialistes[1] qui n'en croient pas leurs oreilles parce qu'illes avaient été pris dans l'élan d'enthousiasme révolutionnaire des jeunes arabes (le silence n'est pas total: on nous présente quelques analyses de temps en temps, notamment ici, mais ça date d'un mois). Les plus chiant-e-s sont ceux et celles qui ont admiré le mouvement en disant tout haut: «Regardez comme ils sont chouettes, ils veulent devenir comme nous! » Quand les mêmes contestations surviennent ici, justement parce qu'on cherche à devenir «comme nous», ces commentateurs/trices deviennent soudainement aussi impoli-e-s que des mini-Moubarak.

La fin de la dictature Moubarak et Ben Ali[2] (on parlera pas de la chute de Kadhafi, parce que sincèrement je connais rien à la Libye) ne fait que laisser plus de place à d'autres tendances tout aussi totalitaires qui étaient écrasées de peine et de misère par l'ancienne élite. En Égypte, c'était l'armée ; en Tunisie, la religion[3]. Je n'irai pas bêtement dire que «la nature a horreur du vide», parce que la nature, eh ben ça existe pas. Mais disons que sous la dictature, il est possible de passer outre un problème en mettant le problème en prison.

Maintenant, il y a une résurgence de problèmes, dont la pourriture a entretemps atteint le coeur de la pomme. Dans chaque cas, l'origine de la contamination est une confiance aveugle et stupide envers des fous irrationnels et avides. Je refuse de croire que les jeunes révolutionnaires, ceux et celles qui ont tout donné pour la liberté, ont été les premiers/ères à accepter de nouveau leur sujétion. Mais pour une personne qui parvient à comprendre un peu les mécanismes du pouvoir, il y a dix personnes qui n'apprennent rien et qui d'ailleurs, contrairement à ce qu'elles en disent, n'étaient pas là à Tahrir en février 2011[4].

Même si tout n'est pas encore terminé, nous pouvons déjà conclure de l'expérience égyptienne que 800 morts, ce n'était pas assez pour renverser la dictature. Vous pensiez que c'était terminé, le meurtre et la répression? Pantoute. Kin, vlà un petit 22 morts pour vous le rappeler. Si c'était si facile après tout, on vivrait dans les jardins d'Éden depuis 1917.

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Message à A...

En mai, tu m'as dit reviens dans 18 mois, tu vas voir, rien ne sera comme avant. Les enfants ne quêteront plus dans les rues, ce sera la démocratie et tout et tout. Mais l'échéance approche. Quand je reviendrai (inch'Horus), il restera plus que six mois. Je sais que je ne serai pas épaté.

Ce que je ne sais pas, c'est si toi tu auras changé. Tu disais avoir confiance en l'armée égyptienne. Tu disais que c'était la meilleure du monde, qu'elle était « correcte », invaincue et qu'elle agissait toujours de manière loyale. Tu as vanté les mérites de la Nation et tu disais plus ou moins que tu comptais sur la gloire du drapeau égyptien pour amener la démocratie et la liberté au pays.

D'accord, pour une fois j'ai osé rien dire, parce que je vis pas en Égypte et que non, moi non plus (et contrairement à toi) je n'étais pas sur Tahrir en février. Et surtout parce que tu me donnais un lift. Je me justifie parfois mon silence en disant que tu étais trop obstiné, et qu'il valait mieux que tu te rendes compte tout seul de l'évidence de toute façon. Je me dis aussi que peut-être que tu ne croyais pas vraiment à tout ça, que c'était une question de fierté. Je comprends parce que si jamais tu viens à Montréal un jour, je ne te parlerai pas non plus des anciennes raffineries de l'Est, de l'autoroute métropolitaine, des gangs de rue et de l'hélicoptère TVA.

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[1] Vous n'entendrez que rarement les spécialistes du monde arabe dire que le nationalisme est un problème en Égypte. Ni aucun-e commentateur/trice d'aucune autre sorte. Pourquoi? Par ce que la connexion ne se fait même pas dans leur cerveau tellement on leur a vanté la Nation. Très peu reconnaissent que le nationalisme fait partie des facteurs clefs de l'échec d'un projet collectif. Et c'est certainement pas ici au Québec qu'on va trouver des masses pour l'affirmer.
[2] L'ex-dictateur de la... Ça commence par un T. Plusieurs l'ont oublié celui-là depuis qu'on en est revenu-e-s aux vraies nouvelles.
[3] La religion en Tunisie, j'y reviendrai. Répétons aussi que la religion est bien plus présente en Égypte. C'est juste qu'actuellement, c'est encore l'armée qui est au pouvoir.
[4] Merci A... pour m'avoir signalé cette tendance.

samedi 19 novembre 2011

Aliaa Magda Elmahdy a opposé à la crétinerie conservatrice de certain-e-s contre-révolutionnaires (car c'est bien ce qu'illes sont!) ce qu'elle avait de plus franc :son esprit réellement contestataire, réellement libre, et son corps nu.

Vive l'Égypte libre du harcèlement sexuel et des racailles de conservateurs, qui intimident constamment les acteurs/actrices de changement en imposant un Islam tellement rétrograde que celui-ci n'est même pas pratiqué dans les villages les plus retardés du pays [1].

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[1] Notons cependant que le port du voile islamique traditionnel n'est pas une tradition dans plusieurs petits villages reculés, où les femmes laissent parfois leurs cheveux dépasser de leur coiffe. Ma boutade ne vise donc pas à dévaloriser les ruraux de l'Égypte.

vendredi 18 novembre 2011

Mario Roy est con.

J'avais oublié à quel point.

Ici, il associe la criminalité à l'enrichissement, au commerce et à la civilisation. Selon le spécialiste qu'il cite sans arrêt (Steven Pinker - il en fait mention dans un autre édito - ce qui suggère que, cette année, Mario Roy aurait lu UN LIVRE![1]), plus une société est riche et civilisée, moins elle est criminalisée[2]. Il nous sert l'exemple des peuples primitifs d'aujourd'hui pour appuyer son point, et pour expliquer la hausse de criminalité dans les années soixante, il note l'influence de la contre-culture:

« L'examen d'une période plus proche de nous le démontre: la hausse de la violence criminelle à partir des années 60 en Amérique, y compris au Québec, fut un recul atypique presque volontaire. Que s'est-il passé, en effet? Nous avons vécu un processus de «décivilisation», répond Pinker, qui fut le côté sombre de la contre-culture glorifiant le décrochage social, la rébellion, le terrorisme local et le crime. »

La conclusion: il a fallu se reciviliser! J'imagine que ça veut dire qu'il faut en revenir à la « civilisation » des années cinquante.

Ici, il qualifie le campement des Occupistes de bidonville.

Plus récemment, il prétend que la gauche possède un quasi-monopole sur les grands leviers de communication, après s'être posé cette question obsédante : « Pourquoi? Pourquoi la gauche est-elle aussi puissante? »

Au-delà de tout ça, son style est pauvre et rempli de phrases-choc à deux cennes (du style: « Voilà le premier diagnostic qui nous vient. Identifiez-vous d’autres symptômes, docteur? »).

Par ailleurs, quand la loi des probabilités fait qu'une de ses phrases, par hasard, n'est pas complètement imbécile, cette dernière est généralement insipide.

Comme Roy ne mène habituellement jamais ses recherches lui-même, ses arguments d'autorité sont légion. Mais citer un psychologue cognitif quand vient le temps de parler d'histoire du XXe siècle, et tenter de faire avaler le morceau en soulignant simplement qu'il enseigne à Harvard? Est-on vraiment aussi con-ne-s?

L'éditorialiste de La Presse est un bouffon nostalgique qu'on garde parce qu'il fait vendre, rien de moins[3]. Ses textes tiennent de l'escroquerie intellectuelle. La réfutation la plus adéquate à ses borborygmes tiendrait en deux mots: "Ta yeule".

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[1] À moins qu'il se le soit fait résumer par André Pratte.
[2] Ouin, c'est vrai qu'il y a corrélation. Si on compare une société commerçante et riche, comme les USA, et le Québec, qui opprime les hommes d'affaires et la richesse, on peut voir que la violence n'a aucun lien avec la présence de misère... Euh... Oups.
[3] Donnez-moi sa job! Moi aussi je suis capable d'écrire en quinze minutes des articles de 200 mots, tous plus épais les uns que les autres! Et je suis prêt à demander deux fois moins cher pour deux fois plus de travail (donc une demie-heure par jour).

vendredi 11 novembre 2011

le réalisme, le désir, l'imagination.

Ce n'est pas parce que des estimations ultraconservatrices considèrent mes idées comme étant irréalistes que je vais m'empêcher d'exiger ce qu'il y a de mieux. Les gens qui rejettent les possibilités infinies sous prétexte que le présent est inchangeable[1] sont condamnés à l'imbécilité. Pas parce que leur choix est idiot, mais bien parce que ce choix fera d'eux des imbéciles incapables de la moindre imagination.

Il n'y a rien de plus suicidaire que de moduler ses désirs en fonction de ce qui est jugé réalisable. On peut très bien ne pas croire vraiment à un renversement ou à une émancipation, mais renoncer à les désirer, c'est s'avorter soi-même.

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[1] Et même en admettant que ce soit effectivement le cas!

jeudi 10 novembre 2011

Manifestation étudiante du 10 novembre

La manif

Les analyses qui parlent d'une manifestation comptant entre 5 000 et 10 000 personnes sont ou bien salement conservatrices, ou bien tout simplement de mauvaise foi. Je suis pas mal certain que si autant de monde s'était présenté pour soutenir une cause quelconque défendue par les trash-radios de Québec, on aurait encore parlé, comme d'habitude, de "50 000" personnes. Et oui, il y avait bien du monde "à perte de vue". Mais bien honnêtement, pour une énième fois, je n'ai aucune idée de notre nombre exact. Je sais cependant qu'une foule de 5 000 personnes, ça ne ressemble pas à ça.

Pour une fois, Péladeau corp. semble moins à côté de la plaque, avec son estimation de 20 à 30 000.

Mis à part le nombre, je dois avouer que je n'ai rien à dire sur la manif. Franchement, c'était plate[1]. Trop froid, trop de pluie, trop de monde. Je n'avais aucune idée de ce qui se passait en avant ni en arrière. Quand on a enfin bougé, ce ne fut que pour faire quelques pas sur quoi, 1km? Et puis il paraît qu'on a coupé le micro à quelqu'un qui tenait à faire une annonce au sujet de l'occupation de McGill. Bon, c'est qu'une rumeur, mais si c'est vrai, c'était vraiment pas correct.

Enfin, je n'étais pas là pour vérifier, je déteste les discours. Surtout les discours mornes et jaunes des gens du club-école du PQ-PLQ. Ces gens-là, ce seront les mêmes qui feront des coupures en éducation dans trente ans; je verrais pas pourquoi je les écouterais, ils ont déjà commencé à préparer le terrain[2].

Félicitations quand même aux courageux/euses qui sont parvenu-e-s à hisser des banderoles sur les édifices du centre-ville ou qui ont dénoncé la FECQ-FEUQ par une action symbolique sur un viaduc.

J'ai lamentablement échoué, mea culpa.

D'accord, j'ai laissé passer deux agents de sécurité au piquetage de l'UQÀM ce matin. Je vous jure que c'était pas par lâcheté. J'étais dans la lune, c'est tout. Le premier s'est approché, je me suis poussé, il est passé. Tout de suite après, je me suis rendu compte de mon erreur. J'ai retenu celui d'après, mais il m'a échappé. Il s'est frotté à une autre personne qui était pas mal plus réveillée et qui bloquait le chemin. Finalement, il est entré par une autre porte, au moment ou des étudiant-e-s sortaient. Encore à ce moment-là, j'aurais pu réagir. Mais bon, c'était mon premier piquetage à l'UQÀM; naïvement, je m'étais dit que personne n'essaierait de traverser une ligne de manifestant-e-s. Alors j'ai rien fait. Je suis resté comme un con, les mains dans les poches, sans bouger.

Faut dire, le piquetage, c'est pas mon action préférée.

Je trouve un peu difficile d'expliquer aux gens qu'ils ne peuvent pas entrer dans un lieu public. Et quand on évoque le droit de libre-circulation, auquel je tiens férocement, eh bien je gèle. Comme quand on me demandait, il y a quelques années, de définir clairement le concept de libertés collectives.

Bon, là je cherche à me justifier. Mais franchement, je regrette. Désolé, M... Si j'avais pas agi comme une vulgaire larve, t'aurais eu moins de misère.

Je ne laisserai plus entrer d'agent-e-s de sécurité. Je ne laisserai plus entrer d'agent-e-s de sécurité. Je ne laisserai plus entrer d'agent-e-s de sécurité. Je ne laisserai plus entrer d'agent-e-s de sécurité. Je ne laisserai plus entrer d'agent-e-s de sécurité.

Voilà, copié cinq fois. C'est pardonné?
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[1] Au moins j'étais en bonne compagnie.
[2] J'ai meilleur espoir en ce qui concerne quelques personnes de l'ASSÉ, dont certaines m'inspirent beaucoup de respect. Il est possible qu'au fil des années le temps érode leurs convictions et qu'elles finissent par se trahir. Mais faut le spécifier: il n'y a que les personnes sincères qui ont quelque chose à trahir.

mercredi 2 novembre 2011

Subversions II: jusqu'au 15 novembre!

Le recueil de nouvelles Subversions, qui regroupe 16 textes de fiction écrits par 18 auteur-e-s, se diffuse lentement mais sûrement. Nous sommes maintenant présent-e-s dans plusieurs librairies de Montréal et de petites villes du Québec. D'autres livres ont été distribués un peu partout à travers le monde grâce à l'appui de notre réseau, et aussi grâce aux efforts d'AK-Press. Si tout se passe comme prévu, il sera en outre bientôt possible d'emprunter Subversions à la BanQ!

En raison du plaisir que nous avons eu à écrire et produire ce livre, le Bloc des Auteur-e-s Anarchistes a décidé de renouveler l'expérience. Voilà pourquoi nous invitons tous les auteur-e-s de fiction anarchiste à envoyer leurs nouvelles littéraires en nous contactant à cette adresse. Vous pouvez aussi trouver plus d'informations sur notre site web.

La nouvelle doit compter au maximum 2500 mots. Nous étudions toutes les candidatures en français, en anglais, en espagnol et en italien.

Le style est libre: essayez cependant de soumissionner des textes antiautoritaires, audacieux, subversifs ou engagés. Ils peuvent aussi être antimilitaristes, écologistes, féministes, ils peuvent traiter d'inégalités sociales, etc. Ils peuvent appartenir à plein de genres: science-fiction, fantasy, fantastique, psychologique, drame, policier, autofiction...

Vous n'avez par ailleurs pas besoin d'être anarchistes vous-mêmes pour proposer un texte; mais mettons que ça aide.

Nous avions fixé, comme je l'ai déjà mentionné, la date limite de réception des textes au 31 octobre, mais finalement, nous l'avons repoussée au 15 novembre. Il vous reste donc encore plus de dix jours pour nous envoyer quelque chose! Vous pouvez aussi vous greffer aux comités en nous écrivant.

Citation du mois

«Dans ma jeunesse, j'ai pu me croire révolutionnaire et ce n'est guère que dans la quarantaine (au contact de l'Espagne) que je me suis découvert anarchiste. Une telle prédisposition congénitale explique mes difficultés en matière d'autorité subie ou exercée. Si je rejette tranquillement les ordres, je ne sais pas, non plus, en donner.»

- Pierre Dansereau. (1911-2011)