jeudi 29 décembre 2011

Sommet Générations d'idées.

Un mois plus tard, les réponses sont toutes trouvées.

mercredi 21 décembre 2011

reportage sur les mines canadiennes à l'étranger

Vous avez jusqu'au 23 décembre pour visionner ce reportage dénonçant les conséquences écologiques et sociales de la création de mines à ciel ouvert par des compagnies canadiennes en Amérique latine.

Les Nouveaux Conquistadors

Ils auront leur os, les chiens.

Henderson se prend 10 mois de prison dans la gueule, auxquels il faut ajouter le mois qu'elle a déjà passé en-dedans. Et elle n'est pas la seule. Ça continue. Je ne connais de mots en aucune langue pour exprimer mon mépris des hommes de loi.

Rappelons que la répression n'a jamais jusqu'à présent connu de fin. Les conditions sévères de remise en liberté et les procès de comédie se poursuivent.

Peu importe l'enfer que vivent et vivront les résistant-e-s, je reste persuadé que l'histoire rendra justice à ceux et celles qui ont désobéi. Les puissants sont effrayants quand ils sont en vie, mais le visage des oppresseurs prend avec les siècles une apparence de plus en plus grotesque et pathétique.

dimanche 18 décembre 2011

Facho-Watch

Ouverture de Québec Facho Watch — http://www.FachoWatch.com/
Suite à près d’un mois de travail intensif, le site web de Québec Facho-Watch est enfin prêt à être ouvert au public !
Facho-Watch, c’est un front commun antiraciste et antifasciste, mais neutre et sans affiliation partisane, créé en réaction à une recrudescence de groupuscules xénophobes et fascistes au Québec.
Vous trouverez sur Québec Facho-Watch de nombreux dossiers très complets sur chacun des acteurs principaux de cette nouvelle génération d’idéologies fascisantes. Nous exposerons au grand jour leurs liens avec l’extrême-droite et les néo-nazis en nous appuyant sur des preuves, des photos, leurs fréquentations, des analyses idéologiques et des sources diverses.
Les motivations nous ayant poussé à lancer ce projet sont non seulement l’importante montée de ces idées réactionnaires au Québec, mais surtout l’ignorance accablante des médias et du public face à cette nouvelle mouvance qui trompe les québécois et québécoises en dissimulant leurs idées sous des apparences plus modérées. L’ignorance et la banalisation sont des dangers encore plus menaçants que leurs idées et créent un terrain fertile pour la croissance du fascisme.
En tant que résistants et résistantes contre les idées fascisantes, il est de notre devoir d’informer le public face à cette menace, d’où la nécessité d’un outil d’information collectif. C’est dans cette optique qu’est né Québec Facho-Watch.
Étant un projet construit sur des bases collectives, toutes personnes partageant nos objectifs communs sont les bienvenu(e)s à collaborer avec nous en nous soumettant informations, photos, suggestions de publications, correctifs, etc. Facho-Watch c’est toi, c’est moi, c’est eux, c’est vous, c’est NOUS !
Détruisons les graines de l’intolérance avant qu’elles s’enracinent dans notre société ! Le fascisme c’est la gangrène, on l’élimine ou on en crève !
http://www.FachoWatch.com/
Sujets abordés (catégories) :
- Groupes, organisations et partis politiques
- «Skinheads» et groupuscules de rues
- Historique
- La fachosphère et médias de droite
- Scène musicale
- Articles
- Actualité
Plusieurs autres articles seront publiés après l’ouverture du blog. Inscrivez-vous à notre Newsletter pour être avisé des nouvelles publications !
Afin de présenter Québec Facho-Watch en détails, nous vous suggérons de lire notre texte de présentation : http://www.fachowatch.com/presentation/
Merci de faire circuler ce communiqué le plus largement possible !

vendredi 16 décembre 2011

détail manquant - nombre de médecins au Québec

Bel article tronqué dans Le Devoir:

"Le Québec n’a jamais compté autant de médecins"

L'article ne nie pas que la pénurie existe toujours mais se contente de comparer la situation du Québec avec le reste du Canada, devant lequel il ne fait pas trop mauvaise figure. Cependant, si on compare le nombre de médecins par 1 000 hab. au Québec, soit 2,24, avec d'autres pays, eh bien on arrive à ceci:

Pays-Bas: 3,8 / 1 000 hab.
Italie: 3,7 / 1 000 hab.
Allemagne: 3,5 / 1000 hab.
USA: 2,4 / 1000 hab.
Pologne: 2,2 / 1000 hab.

La source date de 2009.

Pour une comparaison plus large, il est possible d'analyser ce tableau sur statistiques-mondiales.com. Mais rien ne vaut, bien entendu, un bon Atlas encyclopédique récent.

Maintenant, on peut ajouter Amélie Daoust-Boisvert sur la (longue) liste des journalistes qui rédigent leurs articles en 15 minutes et sans faire de recherches. Espérons qu'elle soit payée de l'heure.

Je vous donne un lien direct vers l'étude citée par la journaliste. Les données analysées sont majoritairement en p. 90. Un autre tableau utile (p. 147) nous apprend que le Québec compte glorieusement 2 chirurgiens plastiques pour 1 radio-oncologue (une proportion malheureusement approximative).

jeudi 8 décembre 2011

notes sur le keffieh

Depuis quelques années, le keffieh, foulard palestinien ou arafat est devenu un objet de mode tendance. Peu coûteux, pratique et esthétique, il est porté depuis peut-être 2008 par beaucoup de monde sans connotation politique marquée.

Seulement voilà, beaucoup d'activistes ne sont pas content-e-s, parce que maintenant, le keffieh vient dans toutes les couleurs et parce qu'il est devenu un objet de consommation comme un autre. Il y a même un groupe Facebook pour dénoncer le port apolitique du keffieh et insister sur sa valeur de symbole[1]. Un activiste québécois, dans un petit vidéo que je n'arrive plus à trouver (merci de poster un lien si vous savez duquel je parle), dénonçait ce phénomène dans les mêmes mesures.

Pour résumer ce qui se dit:
- les gens qui le portent sans connaître sa portée politique ont pas rapport;
- le keffieh est soit bleu et blanc, rouge et blanc, noir et blanc et à la limite, peut-être, noir et rouge. Le reste des keffiehs, eh bien ce sont pas des vrais.
- À la limite, vaut mieux pas le porter, parce que c'est devenu un objet de consommation.

Je ne l'ai pas porté avant 2008, le keffieh. Parce que c'était justement, auparavant, un objet de la mode militante, et que je sentais que le fait de le porter était en lien avec un certain conformisme, voire une pression normative. Avant d'être un objet de consommation de masse, c'était encore un objet de consommation... d'une sous-culture. Tout le monde en avait un, souvent bien jauni par le temps et la poussière. Je pense qu'en 2004, je devais connaître tout le monde qui portait un keffieh à Victoriaville, parce qu'on fréquentait plus ou moins les mêmes cercles. Montréal c'est une autre affaire, mais je suis pas mal certain que plusieurs activistes originaires de la métropole se sont déjà fait le même genre de réflexion. Le keffieh était un symbole d'identification très fort. Tu en portais un, tu croisais une autre personne qui le portait, et intuitivement, il y avait un lien qui se tissait.

Maintenant, la sous-culture boude parce qu'un de ses symboles a été récupéré par le capitalisme et la haute-couture.

Bien entendu, je trouve que l'instrumentalisation du keffieh dans l'article du Elle était pitoyable et scandaleuse. Mais il faut toujours s'attendre à ce genre de récupération par du monde qui nous disent quoi faire/comment le porter/où l'acheter.

Ce qui est peut-être dommage, c'est que le port du keffieh s'est élargi à partir d'une sous-culture politisée vers une masse plus ou moins consciente dans les pays d'Occident. La plupart des activistes le comprennent comme ça. On leur a volé quelque chose.

Sauf qu'à l'origine, il faut comprendre que le keffieh a toujours revêtu une grande variété de formes. Et qu'il y a plusieurs décennies, le keffieh a été récupéré politiquement par le peuple palestinien lui-même. Ce type de foulard existait déjà avec les motifs qu'on lui connaît: c'était un foulard bédouin généralement porté sur la tête (d'où le mot keffieh, qui vient probablement de koufia, "coiffe"; notons que le nom de l'objet a donc été emprunté aux Européens)[2].

Et, indépendamment de la cause palestinienne, les Bédouins ont continué de le porter jusqu'à aujourd'hui. De façon à ce qu'il s'étende à beaucoup de populations arabes du Mashreq et de l'Afrique du Nord-est, qui l'ont adopté soit par proximité avec les Bédouins, soit par mimétisme. La lutte pour la libération de la Palestine n'a pas grand-chose à voir là-dedans, même si plusieurs Égyptien-ne-s, Jordanien-ne-s et cie. le portent pour des raisons politiques.

Lors de mon premier voyage dans le sud de l'Égypte, j'ai pu observer que la moitié des jeunes hommes des classes populaires le portaient par-dessus leur galabyia, avec une des extrémités rejetée par-dessus l'épaule. Plus tard dans l'été, ils le portent sur la tête pour se protéger du soleil. Leur keffieh était généralement plus grand que ceux qu'on trouve dans le cou des activistes, et fait dans un coton plus épais.

Par ailleurs, un vrai keffieh ne se distingue pas par sa couleur, mais par sa fonction.

Ce que j'ai pu remarquer sur le sujet, c'est que les Égyptien-ne-s ne se gênent pas du tout (et même dans les bleds!) pour porter des keffiehs de toutes les couleurs. Violets, jaunes, gris, il y en a des variétés infinies. J'ai appris récemment que les Nubien-ne-s avaient leur propre version adaptée depuis des lunes, avec trois couleurs. Connaître ce détail a profondément dédramatisé pour moi le port du foulard "palestinien". Ça m'a aussi fait comprendre que plusieurs activistes d'aujourd'hui analysent la situation avec leurs yeux d'occidentaux amateur-e-s d'exotisme.

De la même manière, des amateur-e-s de thé font grand cas de certains arômes et considèrent la cérémonie du thé comme quasiment sacrée : alors qu'en réalité, 98% de la population mondiale[3] n'en a rien à foutre de la cérémonie du thé. Elle fait cramer les feuilles avec son eau trop chaude et boit dix-huit tasses par jour dans des théières sales. Le thé, c'est banal. C'est un breuvage du quotidien.

Le caractère sacré que donnent plusieurs personnes d'ici au thé et au keffieh est selon moi un signe de plus que l'orientalisme n'est pas mort, malgré la mondialisation. L'Occident fantasme toujours sur un Orient imaginaire et idéalisé.

Il paraît qu'inversement, des Japonais-e-s se laissent embobiner par des rumeurs idiotes concernant des produits d'Amérique du Nord. Comme quoi, je sais pas, le musc de chevreuil et le sirop d'érable seraient aphrodisiaques.

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[1] "Ce groupe n’est pas pour dire de cesser de porter un keffieh, BIEN AU CONTRAIRE ! Seulement, dites à vos amies qu’il s’agit d’un symbole palestinien."
[2] On pourrait aussi souligner que la récupération politique d'un objet ne vaut guère mieux que la dépolitisation d'un symbole.
[3] Les 2% = quelques Japonais-es.

dimanche 27 novembre 2011

Tout le monde est nationaliste mais...

Les partis politiques de tous les horizons, ainsi que les groupuscules de la droite économique, ont une position clairement affirmée sur le plan de l'identité. Même Charest se définit comme nationaliste québécois. Ici, se revendiquer du nationalisme est un peu comme se dire humaniste ou démocrate. C'est une norme.

Je me demande même si ce ne sont pas les antinationalistes du Québec qui passent pour des hurluberlus, comme ces Américain-e-s qui ne s'affichent pas comme des true patriots.

J'ai déjà expliqué à plusieurs reprises pourquoi j'étais contre le nationalisme, cette idéologie dégoûtante et irrationnelle, qui n'a pas besoin de preuves objectives pour justifier sa fierté ridicule et sa haine de tout ce qui est différent. Le nationalisme n'en a pas besoin de preuves objectives, parce qu'il est basé sur l'émotion[1]. Et c'est par l'émotion qu'on manipule des gens et qu'on peut les convaincre de faire des choses qui vont contre leurs intérêts. Parce que s'ils ne vont pas à la guerre pour défendre leur soit-disant patrie, la honte va les dévorer. Parce que s'ils n'appuient pas les lois liberticides et les sacrifices qu'imposent l'autoritarisme, ils penseront que c'est parce qu'ils sont des traîtres à leur soit-disant Nation.

Le nationalisme, c'est le règne de la simplicité d'esprit, de l'émotion romantique, du sacrifice et de la terreur. Écoutez tous les beaux discours nationalistes d'aujourd'hui: à mille lieux de la réalité, ils se concentrent surtout sur des formules convenues et exaltantes. La Légion Nationale, un des groupuscules qui est à l'origine du rassemblement d'hier, nous en donne un bon exemple:

"Nous sommes dignes et nous resterons vrais!
Nous sommes fiers et nous resterons forts!
Nationalistes, unissons nos forces!
Agissez avant qu’il ne soit trop tard!"

C'est toujours le même schéma, surtout depuis la fin des années 90. On est à cent lieues de Gilles Vigneault et de Félix Leclerc[2]: le nationalisme n'est plus lié à un projet émancipateur. Il est porteur d'un projet menacé. Sur ce thème, tous les nouveaux nationalismes partagent le même discours. L'État (canadien) n'est plus l'ennemi. L'ennemi, c'est l'étranger/ère, l'immigrant-e qui ne partage pas les prétendues valeurs nationales, ou encore la langue.

Ces idées de valeurs pures peuvent mener à des dérives homogénéisantes. Ça veut dire, en gros, que dès qu'on admet qu'une valeur nationale ne permet aucune concession, comme l'entend Serge Ayoub[3], eh bien on ne peut permettre aucune dérogation à ces valeurs. Et si les valeurs d'une nation, c'est le mariage, la femme à la maison et l'hétérosexualité[4]? Les valeurs traditionnelles d'une nation sont rarement universelles et tolérantes, justement parce qu'elles sont centrées sur le passé, sur un groupe défini et sur la pratique à long terme. Elles ne sont pas adaptables, ni flexibles. Et ça, c'est une constante. C'est pour cela que les nationalistes sont toujours des conformistes autoritaires, malgré le statut de marginaux que revendiquent fièrement quelques groupes extrémistes. Jamais illes ne nous laisseront vivre notre vie comme on l'entend.

Mais les politicien-ne-s et groupuscules continueront toujours de brandir l'identité nationale pour mousser leur option politique. C'est généralement une manipulation plus ou moins consciente qui sert à enterrer le programme sous l'appel à la Nation. Mais chez les néonazis, comme chez leurs émules plus politiquement corrects, c'est le contraire : le programme (empruntant souvent des éléments anticapitalistes!) sert avant tout à camoufler le message ultranationaliste et raciste. Quant à leur conduite, elle est bien léchée: il s'agit en résumé de plaire à l'ordre établi, qu'ils ne veulent pas du tout troubler. Ils arrivent à se faire passer pour des gens raisonnables et parviennent ainsi à tromper beaucoup de monde.

Or, les traditions, les valeurs pures de la nation, le chauvinisme xénophobe, et surtout le sentiment d'honneur qui est au centre du projet de Nation, ça n'améliore pas votre vie. Ça l'empoisonne.

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[1] Salut aux camarades du RRQ qui sont persuadés que le discours émotionnel vaut mieux que les faits présentés de manière objective, et qui me l'ont dit ouvertement.

[2] Quelques personnes sont encore attachées à cette forme de nationalisme, qui se caractérise par sa modération exemplaire et sa meilleure capacité d'accueil. Notons que beaucoup parmi ceux-là ne s'objecteraient pas à la création d'un État pour les autochtones du Canada, quittes à amputer le territoire du Québec! J'ai quand même beaucoup de respect pour ça. Le problème, cependant, c'est que ce nationalisme est en voie de disparition et il est lui aussi graduellement affecté par la peur des étrangers/ères. Même Vigneault, qui a dit "ma maison c'est votre maison" reprend un discours basé sur la menace des autres langues et cultures qui pèse sur la culture québécoise.
[3] Ce crétin qui se dit contre l'impérialisme mais qui, 30 secondes plus tard, fait l'apologie de l'impérialisme napoléonien et de l'armée française marchant jusqu'à Moscou.
[4] L'extrême-droite de Montréal s'attaque aussi aux gays. Je cherchais d'autres sources que celle mentionnée sur l'hyperlien, mais malheureusement, les articles en question chez Lagacé ont disparu.

samedi 26 novembre 2011

des "indépendantistes"

"Un groupuscule indépendantiste qui manifestait au centre-ville de Montréal a été la cible de projectiles, pour une raison qui demeure inconnue, samedi."

Pour une raison qui reste inconnue? C'était des nazis, câlisse! Pas des matantes polies qui font du porte-à-porte pour renouveler des cartes de membres du PQ. Des nazis!

Autre traitement moche de l'évènement: "Un groupe d’une trentaine de personnes qui manifestait pacifiquement au coin de la rue Guy et du boulevard René-Lévesque aurait été attaqué par une quinzaine d’individus, selon Danny Richer, porte-parole de la police de Montréal."

Wow. Vraiment, bravo les médias. Vous faites bien votre devoir de chiens savants des forces de l'ordre. Avec de la chance, vous allez peut-être avoir un biscuit.

mardi 22 novembre 2011

Les sans-abris de la Place Victoria.

Quelques personnes se moquent des occupistes de Montréal et de leurs camarades sans-abris avec qui ils partagent leur campement. Agnès Gruda a publié, dans la Presse, un article absolument indigeste sur le sujet, dans lequel elle dit notamment que la brutalité policière a aidé les Indigné-e-s des USA à se faire de la pub. Tout le monde le sait en effet qu'on aime ça nous autres les activistes, se faire battre et mettre en prison[1].

Elle dit aussi que les Indigné-e-s de Montréal se sont piégé-e-s eux-mêmes parce que la démocratie directe, eh bien c'est médiocre parce que c'est pas assez coercitif. Voilà une analyse totalement aberrante qui témoigne bien d'une absence totale d'expérience sur le terrain. Il est évident pour moi que la démocratie directe, avec recherche de consensus et libre-association/dissociation est beaucoup plus efficace dans une petite collectivité qui vit ensemble que la tyrannie élue. Mais bon.

On suggère finalement que les SDF et drogué-e-s sont devenu-e-s plus nombreux/euses que les Indigné-e-s sur le campement. Cela suppose qu'on ne peut pas être à la fois toxico et engagé-e socialement. Cela dit, il est plausible que plusieurs personnes en difficulté aient profité de la présence des Indigné-e-s dans la rue pour un peu de chaleur et de nourriture.

Des Indigné-e-s eux-mêmes, craignant à juste titre pour leur sécurité, ont paraît-il énoncé un désaccord profond face à la présence des sans-abris. Ceux-là non plus n'ont pas compris l'importance du rôle qu'ont à jouer les indésirables dans cette histoire.

Car la présence des indésirables de notre société, le sous-lumpen-prolétariat, est une preuve de l'échec non pas des occupistes, mais de notre société de banquiers. Par leur existence, par le délaissement auquel illes sont à tout autre moment de l'année victimes, illes incarnent les faits à l'épreuve de toute réfutation démagogique. En concentrer quelques dizaines dans le centre financier de Montréal, c'est mettre à la face des capitalistes et gouvernant-e-s leur propre merde, le désastre qu'illes ont provoqué par leur comportement de sociopathes.

La droite se moque bien des Indigné-e-s maintenant. Elle dit que le Square Victoria est devenu un petit bidonville. Elle oublie de mentionner que cette misère existe même quand personne n'occupe de parc au centre-ville. Et que ce n'est pas la destruction du campement qui empêchera des gens de mourir d'une overdose ou d'être atteints de crises paranoïaques.

Les puissant-e-s doivent se rendre compte que ce que les Indigné-e-s sont en train de faire, c'est de leur montrer en plein sous les yeux les avaries du système qui ont fait d'eux des dynamiques créateurs/trices de richesse. Illes leur montrent que beaucoup de gens ne profitent en rien de ce régime antisocial.

Retenez bien ce message: il n'y a pas que la classe moyenne qui souffre!

Mise à jour: Même si je ne m'attends pas à une résistance de leur part, j'espère qu'au moment de l'expulsion devenue aujourd'hui imminente, les Indigné-e-s vont penser à faire un appel à tous et à toutes pour une manif de soutien!
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[1] Il faut du moins croire ce qu'en disent ces chroniqueurs/euses-là, qui se sont jamais fait battre ni mettre en prison.

lundi 21 novembre 2011

les tanks dans les rues, l'armée au pouvoir.

Je n'avais pas besoin de beaucoup de lucidité pour dire, il y a quelques mois:

« C'est un peu con de dire que le renversement de Moubarak fut une révolution: allumez câlisse, il y a des tanks dans les rues, LES MILITAIRES SONT AU POUVOIR! »

Maintenant que ça a recommencé à péter, parce que les militaires (représentés par la police) sont plus lents à rendre le pouvoir au peuple qu'à mettre le doigt sur la gâchette et sous la jupe des Égyptiennes qui ont le culot de contester, plusieurs commentateurs/trices, ahuri-e-s, décident de garder le silence. Le « printemps arabe » n'a définitivement plus la cote, malgré les nouvelles qui nous parviennent encore assez souvent.

Beaucoup se taisent et attendent, même des universitaires et des spécialistes[1] qui n'en croient pas leurs oreilles parce qu'illes avaient été pris dans l'élan d'enthousiasme révolutionnaire des jeunes arabes (le silence n'est pas total: on nous présente quelques analyses de temps en temps, notamment ici, mais ça date d'un mois). Les plus chiant-e-s sont ceux et celles qui ont admiré le mouvement en disant tout haut: «Regardez comme ils sont chouettes, ils veulent devenir comme nous! » Quand les mêmes contestations surviennent ici, justement parce qu'on cherche à devenir «comme nous», ces commentateurs/trices deviennent soudainement aussi impoli-e-s que des mini-Moubarak.

La fin de la dictature Moubarak et Ben Ali[2] (on parlera pas de la chute de Kadhafi, parce que sincèrement je connais rien à la Libye) ne fait que laisser plus de place à d'autres tendances tout aussi totalitaires qui étaient écrasées de peine et de misère par l'ancienne élite. En Égypte, c'était l'armée ; en Tunisie, la religion[3]. Je n'irai pas bêtement dire que «la nature a horreur du vide», parce que la nature, eh ben ça existe pas. Mais disons que sous la dictature, il est possible de passer outre un problème en mettant le problème en prison.

Maintenant, il y a une résurgence de problèmes, dont la pourriture a entretemps atteint le coeur de la pomme. Dans chaque cas, l'origine de la contamination est une confiance aveugle et stupide envers des fous irrationnels et avides. Je refuse de croire que les jeunes révolutionnaires, ceux et celles qui ont tout donné pour la liberté, ont été les premiers/ères à accepter de nouveau leur sujétion. Mais pour une personne qui parvient à comprendre un peu les mécanismes du pouvoir, il y a dix personnes qui n'apprennent rien et qui d'ailleurs, contrairement à ce qu'elles en disent, n'étaient pas là à Tahrir en février 2011[4].

Même si tout n'est pas encore terminé, nous pouvons déjà conclure de l'expérience égyptienne que 800 morts, ce n'était pas assez pour renverser la dictature. Vous pensiez que c'était terminé, le meurtre et la répression? Pantoute. Kin, vlà un petit 22 morts pour vous le rappeler. Si c'était si facile après tout, on vivrait dans les jardins d'Éden depuis 1917.

***

Message à A...

En mai, tu m'as dit reviens dans 18 mois, tu vas voir, rien ne sera comme avant. Les enfants ne quêteront plus dans les rues, ce sera la démocratie et tout et tout. Mais l'échéance approche. Quand je reviendrai (inch'Horus), il restera plus que six mois. Je sais que je ne serai pas épaté.

Ce que je ne sais pas, c'est si toi tu auras changé. Tu disais avoir confiance en l'armée égyptienne. Tu disais que c'était la meilleure du monde, qu'elle était « correcte », invaincue et qu'elle agissait toujours de manière loyale. Tu as vanté les mérites de la Nation et tu disais plus ou moins que tu comptais sur la gloire du drapeau égyptien pour amener la démocratie et la liberté au pays.

D'accord, pour une fois j'ai osé rien dire, parce que je vis pas en Égypte et que non, moi non plus (et contrairement à toi) je n'étais pas sur Tahrir en février. Et surtout parce que tu me donnais un lift. Je me justifie parfois mon silence en disant que tu étais trop obstiné, et qu'il valait mieux que tu te rendes compte tout seul de l'évidence de toute façon. Je me dis aussi que peut-être que tu ne croyais pas vraiment à tout ça, que c'était une question de fierté. Je comprends parce que si jamais tu viens à Montréal un jour, je ne te parlerai pas non plus des anciennes raffineries de l'Est, de l'autoroute métropolitaine, des gangs de rue et de l'hélicoptère TVA.

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[1] Vous n'entendrez que rarement les spécialistes du monde arabe dire que le nationalisme est un problème en Égypte. Ni aucun-e commentateur/trice d'aucune autre sorte. Pourquoi? Par ce que la connexion ne se fait même pas dans leur cerveau tellement on leur a vanté la Nation. Très peu reconnaissent que le nationalisme fait partie des facteurs clefs de l'échec d'un projet collectif. Et c'est certainement pas ici au Québec qu'on va trouver des masses pour l'affirmer.
[2] L'ex-dictateur de la... Ça commence par un T. Plusieurs l'ont oublié celui-là depuis qu'on en est revenu-e-s aux vraies nouvelles.
[3] La religion en Tunisie, j'y reviendrai. Répétons aussi que la religion est bien plus présente en Égypte. C'est juste qu'actuellement, c'est encore l'armée qui est au pouvoir.
[4] Merci A... pour m'avoir signalé cette tendance.

samedi 19 novembre 2011

Aliaa Magda Elmahdy a opposé à la crétinerie conservatrice de certain-e-s contre-révolutionnaires (car c'est bien ce qu'illes sont!) ce qu'elle avait de plus franc :son esprit réellement contestataire, réellement libre, et son corps nu.

Vive l'Égypte libre du harcèlement sexuel et des racailles de conservateurs, qui intimident constamment les acteurs/actrices de changement en imposant un Islam tellement rétrograde que celui-ci n'est même pas pratiqué dans les villages les plus retardés du pays [1].

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[1] Notons cependant que le port du voile islamique traditionnel n'est pas une tradition dans plusieurs petits villages reculés, où les femmes laissent parfois leurs cheveux dépasser de leur coiffe. Ma boutade ne vise donc pas à dévaloriser les ruraux de l'Égypte.

vendredi 18 novembre 2011

Mario Roy est con.

J'avais oublié à quel point.

Ici, il associe la criminalité à l'enrichissement, au commerce et à la civilisation. Selon le spécialiste qu'il cite sans arrêt (Steven Pinker - il en fait mention dans un autre édito - ce qui suggère que, cette année, Mario Roy aurait lu UN LIVRE![1]), plus une société est riche et civilisée, moins elle est criminalisée[2]. Il nous sert l'exemple des peuples primitifs d'aujourd'hui pour appuyer son point, et pour expliquer la hausse de criminalité dans les années soixante, il note l'influence de la contre-culture:

« L'examen d'une période plus proche de nous le démontre: la hausse de la violence criminelle à partir des années 60 en Amérique, y compris au Québec, fut un recul atypique presque volontaire. Que s'est-il passé, en effet? Nous avons vécu un processus de «décivilisation», répond Pinker, qui fut le côté sombre de la contre-culture glorifiant le décrochage social, la rébellion, le terrorisme local et le crime. »

La conclusion: il a fallu se reciviliser! J'imagine que ça veut dire qu'il faut en revenir à la « civilisation » des années cinquante.

Ici, il qualifie le campement des Occupistes de bidonville.

Plus récemment, il prétend que la gauche possède un quasi-monopole sur les grands leviers de communication, après s'être posé cette question obsédante : « Pourquoi? Pourquoi la gauche est-elle aussi puissante? »

Au-delà de tout ça, son style est pauvre et rempli de phrases-choc à deux cennes (du style: « Voilà le premier diagnostic qui nous vient. Identifiez-vous d’autres symptômes, docteur? »).

Par ailleurs, quand la loi des probabilités fait qu'une de ses phrases, par hasard, n'est pas complètement imbécile, cette dernière est généralement insipide.

Comme Roy ne mène habituellement jamais ses recherches lui-même, ses arguments d'autorité sont légion. Mais citer un psychologue cognitif quand vient le temps de parler d'histoire du XXe siècle, et tenter de faire avaler le morceau en soulignant simplement qu'il enseigne à Harvard? Est-on vraiment aussi con-ne-s?

L'éditorialiste de La Presse est un bouffon nostalgique qu'on garde parce qu'il fait vendre, rien de moins[3]. Ses textes tiennent de l'escroquerie intellectuelle. La réfutation la plus adéquate à ses borborygmes tiendrait en deux mots: "Ta yeule".

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[1] À moins qu'il se le soit fait résumer par André Pratte.
[2] Ouin, c'est vrai qu'il y a corrélation. Si on compare une société commerçante et riche, comme les USA, et le Québec, qui opprime les hommes d'affaires et la richesse, on peut voir que la violence n'a aucun lien avec la présence de misère... Euh... Oups.
[3] Donnez-moi sa job! Moi aussi je suis capable d'écrire en quinze minutes des articles de 200 mots, tous plus épais les uns que les autres! Et je suis prêt à demander deux fois moins cher pour deux fois plus de travail (donc une demie-heure par jour).

vendredi 11 novembre 2011

le réalisme, le désir, l'imagination.

Ce n'est pas parce que des estimations ultraconservatrices considèrent mes idées comme étant irréalistes que je vais m'empêcher d'exiger ce qu'il y a de mieux. Les gens qui rejettent les possibilités infinies sous prétexte que le présent est inchangeable[1] sont condamnés à l'imbécilité. Pas parce que leur choix est idiot, mais bien parce que ce choix fera d'eux des imbéciles incapables de la moindre imagination.

Il n'y a rien de plus suicidaire que de moduler ses désirs en fonction de ce qui est jugé réalisable. On peut très bien ne pas croire vraiment à un renversement ou à une émancipation, mais renoncer à les désirer, c'est s'avorter soi-même.

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[1] Et même en admettant que ce soit effectivement le cas!

jeudi 10 novembre 2011

Manifestation étudiante du 10 novembre

La manif

Les analyses qui parlent d'une manifestation comptant entre 5 000 et 10 000 personnes sont ou bien salement conservatrices, ou bien tout simplement de mauvaise foi. Je suis pas mal certain que si autant de monde s'était présenté pour soutenir une cause quelconque défendue par les trash-radios de Québec, on aurait encore parlé, comme d'habitude, de "50 000" personnes. Et oui, il y avait bien du monde "à perte de vue". Mais bien honnêtement, pour une énième fois, je n'ai aucune idée de notre nombre exact. Je sais cependant qu'une foule de 5 000 personnes, ça ne ressemble pas à ça.

Pour une fois, Péladeau corp. semble moins à côté de la plaque, avec son estimation de 20 à 30 000.

Mis à part le nombre, je dois avouer que je n'ai rien à dire sur la manif. Franchement, c'était plate[1]. Trop froid, trop de pluie, trop de monde. Je n'avais aucune idée de ce qui se passait en avant ni en arrière. Quand on a enfin bougé, ce ne fut que pour faire quelques pas sur quoi, 1km? Et puis il paraît qu'on a coupé le micro à quelqu'un qui tenait à faire une annonce au sujet de l'occupation de McGill. Bon, c'est qu'une rumeur, mais si c'est vrai, c'était vraiment pas correct.

Enfin, je n'étais pas là pour vérifier, je déteste les discours. Surtout les discours mornes et jaunes des gens du club-école du PQ-PLQ. Ces gens-là, ce seront les mêmes qui feront des coupures en éducation dans trente ans; je verrais pas pourquoi je les écouterais, ils ont déjà commencé à préparer le terrain[2].

Félicitations quand même aux courageux/euses qui sont parvenu-e-s à hisser des banderoles sur les édifices du centre-ville ou qui ont dénoncé la FECQ-FEUQ par une action symbolique sur un viaduc.

J'ai lamentablement échoué, mea culpa.

D'accord, j'ai laissé passer deux agents de sécurité au piquetage de l'UQÀM ce matin. Je vous jure que c'était pas par lâcheté. J'étais dans la lune, c'est tout. Le premier s'est approché, je me suis poussé, il est passé. Tout de suite après, je me suis rendu compte de mon erreur. J'ai retenu celui d'après, mais il m'a échappé. Il s'est frotté à une autre personne qui était pas mal plus réveillée et qui bloquait le chemin. Finalement, il est entré par une autre porte, au moment ou des étudiant-e-s sortaient. Encore à ce moment-là, j'aurais pu réagir. Mais bon, c'était mon premier piquetage à l'UQÀM; naïvement, je m'étais dit que personne n'essaierait de traverser une ligne de manifestant-e-s. Alors j'ai rien fait. Je suis resté comme un con, les mains dans les poches, sans bouger.

Faut dire, le piquetage, c'est pas mon action préférée.

Je trouve un peu difficile d'expliquer aux gens qu'ils ne peuvent pas entrer dans un lieu public. Et quand on évoque le droit de libre-circulation, auquel je tiens férocement, eh bien je gèle. Comme quand on me demandait, il y a quelques années, de définir clairement le concept de libertés collectives.

Bon, là je cherche à me justifier. Mais franchement, je regrette. Désolé, M... Si j'avais pas agi comme une vulgaire larve, t'aurais eu moins de misère.

Je ne laisserai plus entrer d'agent-e-s de sécurité. Je ne laisserai plus entrer d'agent-e-s de sécurité. Je ne laisserai plus entrer d'agent-e-s de sécurité. Je ne laisserai plus entrer d'agent-e-s de sécurité. Je ne laisserai plus entrer d'agent-e-s de sécurité.

Voilà, copié cinq fois. C'est pardonné?
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[1] Au moins j'étais en bonne compagnie.
[2] J'ai meilleur espoir en ce qui concerne quelques personnes de l'ASSÉ, dont certaines m'inspirent beaucoup de respect. Il est possible qu'au fil des années le temps érode leurs convictions et qu'elles finissent par se trahir. Mais faut le spécifier: il n'y a que les personnes sincères qui ont quelque chose à trahir.

mercredi 2 novembre 2011

Subversions II: jusqu'au 15 novembre!

Le recueil de nouvelles Subversions, qui regroupe 16 textes de fiction écrits par 18 auteur-e-s, se diffuse lentement mais sûrement. Nous sommes maintenant présent-e-s dans plusieurs librairies de Montréal et de petites villes du Québec. D'autres livres ont été distribués un peu partout à travers le monde grâce à l'appui de notre réseau, et aussi grâce aux efforts d'AK-Press. Si tout se passe comme prévu, il sera en outre bientôt possible d'emprunter Subversions à la BanQ!

En raison du plaisir que nous avons eu à écrire et produire ce livre, le Bloc des Auteur-e-s Anarchistes a décidé de renouveler l'expérience. Voilà pourquoi nous invitons tous les auteur-e-s de fiction anarchiste à envoyer leurs nouvelles littéraires en nous contactant à cette adresse. Vous pouvez aussi trouver plus d'informations sur notre site web.

La nouvelle doit compter au maximum 2500 mots. Nous étudions toutes les candidatures en français, en anglais, en espagnol et en italien.

Le style est libre: essayez cependant de soumissionner des textes antiautoritaires, audacieux, subversifs ou engagés. Ils peuvent aussi être antimilitaristes, écologistes, féministes, ils peuvent traiter d'inégalités sociales, etc. Ils peuvent appartenir à plein de genres: science-fiction, fantasy, fantastique, psychologique, drame, policier, autofiction...

Vous n'avez par ailleurs pas besoin d'être anarchistes vous-mêmes pour proposer un texte; mais mettons que ça aide.

Nous avions fixé, comme je l'ai déjà mentionné, la date limite de réception des textes au 31 octobre, mais finalement, nous l'avons repoussée au 15 novembre. Il vous reste donc encore plus de dix jours pour nous envoyer quelque chose! Vous pouvez aussi vous greffer aux comités en nous écrivant.

Citation du mois

«Dans ma jeunesse, j'ai pu me croire révolutionnaire et ce n'est guère que dans la quarantaine (au contact de l'Espagne) que je me suis découvert anarchiste. Une telle prédisposition congénitale explique mes difficultés en matière d'autorité subie ou exercée. Si je rejette tranquillement les ordres, je ne sais pas, non plus, en donner.»

- Pierre Dansereau. (1911-2011)

lundi 24 octobre 2011

Langues sales de Canoe - cohésion interne des "indigné-e-s"

J'aimerais bien savoir ce que les occupistes de Montréal ont à répondre à Canoe, qui note de manière assez biaisée semble-t-il, que les cas de violence se sont multipliés à l'interne dans le campement. Boisson, drogues, attouchements sexuels, agressions physiques, tout y passe. Loin d'être une société-modèle, la micro-société du campement reproduit selon Quebecor les problèmes de notre large société à petite échelle, même l'immigration d'éléments a priori indésirables: voyons voir comment les occupistes répondront à cette critique et au problème plus général de la vie en commun.

Auront-illes recours à la création d'un code de comportement plus serré? À des exclusions définitives? À la création d'un service d'ordre implacable (en bref, une police)? Ou choisiront-illes plutôt de former des comités de médiation sans intervenir de manière coercitive?

Leur tolérance face à la Milice Patriotique du Québec (ou l'Armée de Libération, whatever) me laisse aussi circonspect. Les occupistes se rendent-illes compte qu'illes laissent une tribune de grande importance à une organisation militariste par essence et passablement proche de l'extrême-droite dans sa manière de concevoir le monde?

Je ne sais pas quoi penser de tout ça - je saurai sans aucun doute soudainement quoi penser quand tout aura échoué[1] - et je dois avouer qu'entre la position nuancée de Bakouchaïev et la position plus critique de Youri, je ne sais pas où me situer. J'ai fortement envie de me sentir concerné par le campement, et je me suis surpris à être séduit par l'idée d'y piquer ma tente pour vivre ça le temps que ça vit; en même temps, je ne suis pas séduit par le discours réformiste et les mauvaises inspirations de nos camarades vivant actuellement dans leurs tentes.

Et si je ne me sens étrangement pas concerné par des mesures genre la "taxe Robin des Bois", est-ce que ça signifie que je fais davantage partie du 1% que du 99%? Il y a peut-être de la place pour moi sous une semelle de chaussure bien cirée d'un banquier. À la manière d'une gomme à mâcher persistante, je pourrais rester collé au talon et ramasser des bouttes de gravelle.

Mise à jour: il y a actuellement un débat interne sur la présence de la MPQ.

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[1] Je reconnais à l'avance mon biais. Quand tout sera terminé, je trouverai instantanément plein de nouvelles raisons qui expliqueront cet échec.

mardi 18 octobre 2011

Fanatiques machistes à Montréal.

Ce serait tellement plus facile de les empêcher de lancer leur message de haine si on avait réservé des locaux pour eux à l'UQÀM juste pour le plaisir ensuite de perturber leur hostie de conférence. Je me demande qui a bien pu leur prêter un espace où faire leur propagande irrationnelle.

Le site web de l'organisation, l'IERA, semble de plus hors service. Aura-t-on droit à une réunion quasi-privée comme lors du Congrès pro-vie de 2005, à l'écart de lieux publics plus fréquentés?

lundi 17 octobre 2011

L'histoire nationale.

Je vous recommande d'écouter cette entrevue diffusée à Radio-Canada. C'est une bonne introduction au débat sur l'enseignement de l'histoire au Québec. Rappelons que plusieurs historien-ne-s des courants d'histoire sociale et culturelle affrontent actuellement les historien-ne-s nationaux (et nationalistes!) qui tentent d'en revenir aux bonnes vieilles méthodes. Quant aux enseignant-e-s de niveau secondaire, eh bien je me demande si la majorité a les connaissances suffisantes pour seulement prendre part au débat[1].

Qu'on vienne pas prétendre que la Fondation Lionel Groulx a produit un rapport neutre à ce sujet. Le nom lui-même nous renseigne suffisamment sur l'épaisseur du biais de l'organisme. Lui faire dire qu'on n'enseigne pas assez l'histoire nationale, c'est un peu comme si dans 70 ans, l'Institut Stephen Harper recommandait la construction de nouvelles prisons. Pas crédible.

Oui, il faut encourager l'enseignement de l'histoire, mais une histoire rigoureuse, pas une histoire qui exagère des antagonismes raciaux, nationaux et religieux.

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[1] Bravo cependant à ceux et celles qui aiment réellement élargir leurs horizons en lisant autre chose que des biographies de Hitler et des récits de batailles.

samedi 15 octobre 2011

Rassemblement des "indigné-e-s", Montréal

Quelques médias parlent de 500 personnes, mais je me demande si au moment où je suis parti, on a pas rejoint 800. La place Victoria était bondée.

C'était une manif festive et familiale. Cela n'a pas empêché beaucoup d'anticapitalistes de s'exprimer. J'ai particulièrement aimé le slogan "occupons tout, ne demandons rien", écrit sur une bannière. Il y avait aussi de vieux nationalistes portant le béret, quelques personnalités publiques (dont Christian Bégin et Armand Vaillancourt), et surtout du monde très ordinaire (j'ai même croisé des vieux et vieilles ami-e-s de Victo).

D'une manière générale, je crois que les discours n'appelaient pas à des changements mineurs. En raison peut-être de la forte présence du "contingent" anticolonialiste, il régnait dans la foule un climat orageux qui dépassait les faibles exigences habituelles de la gauche vaguement réformiste. Je pense donc que la sympathie que Flaherty croit avoir pour le mouvement risque de se changer en mépris très bientôt, si c'est pas déjà fait. Dommage quand même que les masses de manifestant-e-s ne décident pas de lui faire plutôt ressentir de la terreur.

La police était invisible, et le service d'ordre absent. Tant mieux. Mais je pense que ça peut changer si le mouvement décide de se structurer ou de chercher des appuis extérieurs, chez les centrales syndicales ou les grandes coalitions par exemple. L'important, au moins, c'est que nous n'avons heureusement pas eu à assister à une chasse aux sorcières au beau milieu d'une foule comprenant des dizaines d'enfants, comme en mai dernier.

vendredi 14 octobre 2011

Quinze jours pour envoyer vos textes.

Le Bloc des Auteur-e-s Anarchistes reçoit des textes de fiction libertaire jusqu'à la toute fin du mois d'octobre. Les nouvelles peuvent être envoyées en quatre langues (italien, français, anglais ou espagnol). Vous pouvez trouver plus d'informations sur le site web de l'organisation. Les meilleurs textes seront choisis dans les mois qui suivront.

jeudi 13 octobre 2011

Chroniques de la Station Berri-UQÀM (2) / mines

Ce matin, sur le plancher d'un wagon de métro sur la ligne orange, il était écrit:

« Mais où allons-nous réellement ? »

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KIN les maudits chiens!

lundi 10 octobre 2011

Encore de la violence. (diversité des tactiques IV)

Suite à la traduction de la lettre d'anarchistes adressée aux occupistes, un long commentaire a été écrit pour dénoncer la « violence » de plusieurs manifestant-e-s et par le fait même justifier l'ostracisme des individus les plus radicaux dans le mouvement des occupistes de Montréal; ce qui est d'ailleurs d'une profonde naïveté étant donné que beaucoup d'anarchistes sincères figurent parmi les initateurs/trices de l'inspiration des occupistes de Montréal. C'est d'autant moins valable qu'en plus de dénoncer la forme, on dénonce, dans ce commentaire, la cible du mouvement, c'est-à-dire le capitalisme. Ce genre de commentaire, typique de la gauche réformiste, a l'air d'une comptine apprise par coeur.

J'ai décidé encore une fois de sortir de la boîte de commentaires afin d'écrire une réponse plus complète et aussi de recentrer le débat.

Tout d'abord, l'intervenant nous dit ceci:

« La très grande majorité des gens sont contre la violence. Prétendre que "ma violence à moi est justifiée - sacage durant les manifs, roches lancées, etc. - parce que les policiers sont violents", ne tient pas la route. Est-ce que les policiers sont violents? C'est une autre question... mais supposons que oui. Se donner le droit d'être violent, c'est comme dire que durant la Deuxième Guerre Mondiale, on aurait eu le droit de gazer les Japonais vivant en Amérique du Nord parce que les Nazies gazaient les juifs. Et une fois qu'on a gagné contre les Allemands, est-ce qu'on aurait eu le droit de fusiller la population au complet? »

Ce qui me dérange tout d'abord dans ce paragraphe, c'est le "on". De quelle victoire parle-t-on suite à la Deuxième guerre mondiale? Immédiatement après la fin et après environ 50 millions de morts, un nouveau conflit, la guerre froide, ne faisait que commencer. Le nazisme a effectivement été défait après 45, mais par qui? Par d'autres régimes autoritaires qui devaient dans les décennies suivantes ostraciser, emprisonner, affamer, assassiner, détruire. Qui est donc ce "on"? Les "démocraties" capitalistes? L'Union Soviétique? Qui est ce "on" qui a en effet violé les femmes berlinoises, et laissé les prisonniers de guerre allemands crever par milliers dans des camps? Qui a spolié les Japonais-e-s de leurs droits en Colombie-Britannique pendant la guerre et par ailleurs refusé l'entrée aux Juifs/ives en exil? Ce même "on".

Je peux paraître m'écarter du sujet en insistant sur un détail sans importance du discours, et pourtant c'est une composante importante du paradigme présent ici. L'auteur du commentaire considère qu'il fait partie d'un tout moralement supérieur qui aurait triomphé par le passé d'une bête immonde et étrangère. Le "on", qui est une entité politique, une autorité, aurait triomphé du nazisme; est-ce ce même "on" qui condamne la violence des manifestant-e-s? En employant un "on" (qui veut dire "nous"), on se positionne vis-à-vis l'autre. Or, la plupart des gens visés par le sermon de notre camarade ici présent considèrent, sans doute à juste titre, que ce "on" de la conscription, de la loi du cadenas, de la censure, du mensonge et de la corruption est aliéné.

Navré maintenant d'avoir fourni une démonstration aussi longue.

Mais ce n'est pas tout. Sur le plan simplement argumentaire, il y a une grosse faille dans le raisonnement. L'auteur du commentaire parle de guerre et de répression, soit de gazer les Japonais par fureur vengeresse, et y associe mutatis mutandis[1] le fait de crisser des roches dans des vitrines. Plus tard, il y associe d'autres exemples de violence extrême, soit le meurtre de médecins pratiquant l'avortement!

« Ce genre de raisonnement me fait vomir... » dit-il en comparant finalement les contestataires d'aujourd'hui à des génocidaires.

Non seulement ces analogies sont inacceptables et puériles, mais en plus, elles sont à double tranchant. La dérive sécuritaire qui a privé les Japano-Canadien-ne-s et Germano-Canadien-ne-s de leurs droits pendant la Deuxième guerre mondiale, le bombardement de Tokyo, les deux bombes nucléaires, le massacre des Berlinois-es, etc. n'étaient pas acceptables, c'est évident. Cependant, que pense l'auteur des violences quotidiennes des armées alliées contre les soldats allemands? Les gouvernements de l'époque auraient-ils dû essayer de contrer la furie nazie en occupant pacifiquement un coin de rue? Je suis pas mal certain de la réponse de Monsieur Étienne. À ce titre, sans doute que ma réponse à moi serait plus étonnante en proposant des solutions moins brutales que la majorité des sociaux-démocrates de ce pays.

De plus, il n'est pas question ici d'attaquer des médecins qui ont des pratiques prétendument illicites ou de punir une population après avoir gagné une guerre. Il s'agit, dans la plupart des cas, de simple autodéfense, alors que les exceptions (les quelques vitrines cassées qui sont loin d'être une foule) sont généralement des attaques en réponse à des atrocités sans nom - Coca-Cola est tout simplement une pépinière à meurtriers - et le vandalisme de quelques machines distributrices ou commerces affiliés (rappelé par l'action du collectif Ton Soeur contre un autre membre de l'empire du sucre: "boire Pepsi, c'est se chier dans la gueule") ne me semble pas disproportionné en regard des assassinats, mais cruellement nécessaire. Idem pour les actions visant les entreprises qui, par leurs politiques, participent à pourrir la vie des gens à travers le monde.

Rappelons aussi que le Printemps arabe, duquel plusieurs occupistes inspirent leur mouvement, a été salement violent, avec des pierres, des bâtons, des cocktails Molotov. Normal, dirons-nous. Les sbires du régime tiraient sur la foule. Mais à quoi au juste faut-il s'attendre? Que les forces de l'ordre laissent les choses se transformer pacifiquement? Ça ne se passe JAMAIS comme ça. Si vous devenez une force de changement, il y aura nécessairement des agressions auxquelles vous devrez faire face. S'il n'y a pas d'abus de la part des puissant-e-s, eh bien soyez-en certain-e-s, ça veut dire que vous êtes pas considéré-e-s comme dangereux/euses.

Comment faire face aux abus? Nous connaissons des dizaines d'approches. La résistance active, passive, le repli stratégique, la fuite désordonnée, la délation de camarades, l'inaction, etc. Ce que, dans mon expérience et mes discussions avec d'autres, j'ai pu conclure de ces approches, c'est que la plupart sont vouées à l'échec. En ce qui me concerne, je pratique habituellement la résistance passive et, dans d'autres situations... eh bien c'est plus la fuite désordonnée. Cela ne m'empêche pas de reconnaître que la résistance active est souvent efficace. Les abus les plus massifs dont j'ai été témoin dans ma vie ont été commis sur des pacifistes qui avaient laissé les flics les arrêter[2]. Bref, vaut toujours mieux se défendre... que de pas se défendre[3].

Pis si vous voulez renoncer à ce que vous appelez de la "violence"[4], ben câlisse, renoncez au changement.

J'en parlais dans un billet intitulé "Pourquoi dénoncer la violence insurrectionnelle?". Dénoncer la violence insurrectionnelle revient à dénoncer les piqûres d'abeilles. Les piqûres ne sont pas toujours méritées et bien ciblées, mais elles sont rarement gratuites. Voilà une autre analogie qui a deux tranchants. Quel rôle jouent les radicaux dans cette représentation? Celui du gamin qui donne un coup de bâton dans la ruche ou celui de la ruche? Un peu des deux.

Mais c'est pas ça qui importe. Ce qui importe, c'est le bâton. Le bâton qui secoue la ruche des radicaux, jeunes de la rue, membres du BB, etc. est matériel: c'est la misère quotidienne et le manque de liberté. Alors que le déclencheur de la répression, c'est un problème imaginaire: un rideau d'illusions, de préjugés, tissé sur une haine colportée par les médias, les officiers, l'école de police. En quelque sorte, ce sont les flics eux-mêmes qui se câlissent un coup de bâton. Comme nous l'avons vu un million de fois, provoquer les flics par des actes de désobéissance civile ou autre action ne change pas grand-chose. Aussitôt que l'ennemi est identifié, les aiguillons sont sortis, l'essaim est groupé: il va frapper.

Mais bon, on s'écarte.

«il en suffit de 10 qui font de la casse pour que le message des 990 autres passent sous silence»


C'est loin d'être certain. De un, si un-e leader prend la parole pour les autres, le message d'une seule personne sur mille sera entendu de toute façon. De deux, plein de journalistes font quand même l'effort pour poser des questions aux manifestant-e-s pacifiques, qu'il y ait débordement ou pas. Vous sous-entendez qu'une manifestation calme a plus de chances de faire passer un message? Je pense que c'est de la bullshit. Je pense que ça dépend plus de la mise en scène que de la radicalité de la manifestation. Si le message est bien passé, qu'il soit accompagné d'une action de perturbation[5] ou non, il passe bien. Quand il est mal passé, il passe mal.

Et quand la population décide de ne pas écouter le message, on peut toujours mettre la faute sur la casse ou les graffitis. S'il y en a pas, on fait porter le blâme à l'indifférence et au cynisme[6]. C'est pas tant une question de méthode que d'habileté dans la communication.

Et en passant, les grands médias ne sont pas nécessairement les meilleurs outils de communication. Avec Internet et/ou une photocopieuse, ils sont contournables. Et si un mouvement part, croyez-moi, les médias vont suivre... leurs intérêts. Pas besoin de faire des courbettes aux faiseurs d'opinions.

Ce qui me choque le plus, finalement, avec le commentaire de l'autre blogueur, ce sont les accusations irréfléchies et ignorantes. La diversité des tactiques ne signifie pas nécessairement lancer des roches et donner des coups de bâton. Ce que la police appelle généralement de la violence, c'est souvent finalement pas grand-chose. Des "cocktails Molotov" qui sont en fait des bouteilles d'eau vides, des "déguisements" qui sont en fait des pansements triangulaires et toute une panoplie de fausses armes, on en voit régulièrement. On essaie de rendre les activistes radicaux épeurants avec de fausses accusations, et stupidement, des gens y croient. Alors que pourtant, dans la plupart des cas, la "diversité des tactiques", ça veut simplement dire bloquer un coin de rue de plus, faire une occupation, écrire des gros mots sur un mur, etc. C'est rarement aller gratuitement défoncer des vitrines et des flics. Dans mon expérience, ce genre d'affrontements plus directs ne surviennent que lorsque les autorités ont déjà commis, souvent sans provocation, des actes très, très répréhensibles. Maintenant, est-ce que je suis en faveur de cette violence bien réelle (quoique défensive)? Euh... Je dirais pas que j'y suis violemment opposé, mais je pense pas vraiment que je vais y participer.

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[1] Hum... Je suis pas certain d'avoir bien utilisé cette expression latine.
[2] C'est le cas des abus massifs, mais peut-être pas individuels. J'ai de sérieuses raisons de croire que la police a l'habitude de battre plus sérieusement une personne active, que ce soit par vengeance ou par pur mépris.

[3] Duh!
[4] Et moi, jamais j'appellerais à l'agression sur des individus, ce qui indubitablement cette fois, serait de la violence.
[5] La perturbation est très précieuse pour acquérir de la visibilité!
[6]«Je suis déçue, a confié Pauline Éthier, une manifestante. J'aurais pensé qu'il y aurait beaucoup plus de monde aujourd'hui. Il y a beaucoup de cynisme dans la population. C'est peut-être la raison pour laquelle les gens ont l'impression que même s'ils font des choses, il n'y a rien qui se passe.»

samedi 8 octobre 2011

Chers occupistes (diversité des tactiques III)

Ceci est une traduction libre d'une lettre envoyée par des anarchistes au mouvement « occupiste »[1] de Wall Street.

Je pense que ça peut s'appliquer aussi au mouvement occupiste de Montréal, mais aussi aux autres mouvements qui sont actuellement en branle au Québec.

Une lettre de la part d'anarchistes.

Appui et solidarité! Nous sommes inspiré-e-s par les occupations sur Wall Street et ailleurs au pays. Enfin, le peuple prend à nouveau la rue! Le momentum autour de ces actions peut potentiellement redonner de l'énergie à la protestation et à la résistance dans ce pays. Nous espérons que ces occupations vont augmenter en nombre et en substance, et nous ferons notre possible pour contribuer à ces objectifs.

Pourquoi devriez-vous nous écouter? Brièvement, parce que nous en sommes rendu-e-s au même point depuis longtemps déjà. Nous avons passé plusieurs décennies à lutter contre le capitalisme, à organiser des occupations, et à prendre des décisions par consensus. Si ce nouveau mouvement n'apprend pas des erreurs passées, nous risquons de répéter ces mêmes erreurs. Nous résumerons ici nos leçons apprises à la dure.

Occuper, c'est pas neuf. La terre sur laquelle nous vivons est déjà un territoire occupé. Les États-Unis tirent leurs fondation de l'extermination des peuples autochtones et de la colonisation de leurs terres ancestrales, sans oublier des siècles d'exploitation et d'esclavage. Pour qu'une contre-occupation (car c'est certainement cela dont il s'agit ici) soit autrement qu'insignifiante, elle doit se souvenir de cette histoire. Mieux encore, elle devrait embrasser des deux bras l'histoire de la résistance, à partir de l'autodéfense autochtone et des révoltes d'esclaves jusqu'aux mouvements pacifistes et altermondialistes.

Les 99%, c'est pas un corps social homogène: c'est beaucoup de monde. Quelques occupistes ont présenté un discours dans lequel le fameux "99%" représente une masse plus ou moins homogène. Le visage des "gens ordinaires", qu'on nous présente souvent, est éminemment suspect: il appartient de manière prédominante à la race blanche et à la classe moyenne et de préférence solvable. C'est ce visage qui apparaît devant les caméras de télévision, même si malgré tout, cette frange de la population ne représente qu'une minorité.

C'est une erreur de passer outre notre diversité. Tout le monde ne s'éveille pas aux injustices du capitalisme pour la première fois: plusieurs populations sont ciblées par le pouvoir depuis longtemps. Les travailleurs et travailleuses de la classe moyenne qui sont en train de perdre leur confort social peuvent apprendre beaucoup de ceux qui ont été du mauvais côté de la balance de l'injustice depuis beaucoup plus longtemps.

Le problème ne réside pas que dans quelques pommes pourries. Cette crise n'est pas le résultat de la cupidité d'une minorité de banquiers; elle est l'inévitable conséquence d'un système économique qui récompense une compétition de requins dans toutes les composantes de notre société. Le capitalisme n'est pas un mode de vie statique mais un processus qui consume tout, transformant le monde entier en profit et, par la bande, en désastre. Et maintenant que tout s'en est allé nourrir l'incendie, le système s'effondre, laissant même ses bénéficiaires précédents sur le pavé. La solution n'est pas d'en revenir à des traditions capitalistes plus anciennes - revenir à l'étalon-or, par exemple - car non seulement c'est impossible, mais en plus, ce stade moins avancé du capitalisme n'a jamais davantage servi les intérêts du fameux 99%. Pour sortir de cet hostie de bordel[2], nous aurons à redécouvrir d'autres manières d'interagir.

La police n'est pas notre alliée. Illes sont peut-être des "travailleurs et travailleuses ordinaires", mais leur emploi consiste à protéger les intérêts de la classe dirigeante. Tant qu'illes resteront policiers/ères, il est impossible de compter sur eux, peu importe avec quelle cordialité illes pourront agir. Les occupistes qui ne le savent pas déjà vont l'apprendre aussitôt qu'illes vont menacer l'ordre établi. Les gens qui insistent sur le fait que la police existe pour nous protéger et nous servir vivent probablement d'une vie confortable chez les privilégié-e-s, mais vivent surtout, sans aucun doute, d'une vie obéissante.

N’idolâtrez pas l'obéissance à la loi. Les lois servent à protéger les privilèges des riches et des puissant-e-s; leur obéir n'est pas nécessairement éthiquement correct; c'est parfois même immoral. L'esclavage a déjà été permis par les lois. Les Nazis avaient des lois aussi. Nous devons, en regard de tout ça, développer notre propre esprit critique, au-delà de ce que les lois peuvent recommander.

La diversité chez les participant-e-s ne se fait pas sans diversité des moyens d'action. C'est de la tyrannie intellectuelle que de prétendre savoir par quel moyen tout le monde devrait agir afin de construire un monde meilleur. Dénoncer autrui permet aux autorités de délégitimiser, diviser et détruire le mouvement en tant qu'entité. La critique et le débat propulsent un mouvement vers l'avant, mais la poigne du pouvoir le paralyse. Le but n'est pas de forcer tout le monde à adopter la même stratégie, mais bien de découvrir comment toutes les différentes approches peuvent devenir mutuellement bénéfiques.

N'allez pas prétendre que ceux et celles qui défient la police et les lois sont nécessairement des agents provocateurs. Beaucoup de gens ont de bonnes raisons d'être en colère. Ce n'est pas tout le monde qui veut se limiter au pacifisme légal; des gens se souviennent encore comment se défendre. La violence policière ne sert pas qu'à nous provoquer: elle sert aussi à nous terroriser et à nous blesser, jusqu'à ce que la peur nous condamne à l'inaction. Dans ce contexte, l'autodéfense est essentielle.

Croire que ceux et celles qui affrontent physiquement les autorités sont en quelque sorte des allié-e-s de ces mêmes autorités, c'est non seulement illogique, mais ça s'attaque également en substance à la contestation, tout en rejetant le courage de ceux et celles qui se préparent à participer à ce type d'action. Cette allégation est par ailleurs typique des privilégié-e-s à qui on a inculqué la foi dans l'autorité et le mépris de la désobéissance.

Aucun gouvernement ni institution de pouvoir centralisé ne mettra jamais les intérêts de la population devant ceux des puissant-e-s. Ce serait naïf de le croire. Le centre de gravité de ce mouvement devrait être notre liberté et notre autonomie, et l'aide mutuelle qui peut soutenir celles-ci. Certainement pas l'attente vaine de l'arrivée d'un pouvoir "imputable". Un pouvoir "imputable", ça n'a jamais existé.

Nous ne devrions pas, en conséquence, nous contenter de faire des demandes à nos gouvernant-e-s. Nous devrions créer les occasions de réaliser les demandes par nous-mêmes. Si nous le faisons, les puissant-e-s de ce monde devront prendre nos demandes au sérieux, au minimum afin de conserver notre allégeance et notre attention sur eux. Pour établir un meilleur équilibre, il faut développer notre propre force.

D'innombrables mouvements ont appris à la dure que le fait d'établir leur propre bureaucratie, qu'elle soit "démocratique" ou pas, a finalement saboté les objectifs originels de leur lutte. Nous ne devons pas confier l'autorité à de nouveaux chefs, ni même créer de nouvelles structures décisionnelles; nous devons trouver des moyens de défendre et d'augmenter notre liberté, tout en abolissant les inégalités dans lesquelles nous avons été plongé-e-s de force.

Les occupations vont bénéficier de nos actions. Nous se sommes pas ici seulement pour "chuchoter dans l'oreille du géant". On aura beau parler, ça n'empêchera pas le pouvoir de rester sourd comme un pot. Il nous faut créer un espace pour les initiatives autonomes et pour organiser des actions directes qui affrontent la source de toutes les inégalités sociales et injustices.

Merci d'avoir lu ce message. Merci d'agir. Que vos rêves deviennent réalité.

http://www.crimethinc.com/


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[1] Je viens de trouver ce nom-là. Ça existait déjà?
[2] Le terme employé en anglais est "mess", et non "fuckin' mess". Vous savez maintenant ce que j'entendais par "traduction libre". Pour le reste, j'ai tenté au maximum de rester dans l'esprit du texte original.

jeudi 6 octobre 2011

virilité et homosexualité

Voici une courte entrevue diffusée sur le sujet à Radio-Canada.

mercredi 5 octobre 2011

Diversité des tactiques (2)

J'y ai pensé un bon moment avant de poursuivre ma réflexion sur les moyens d'actions (bien franchement, je m'attendais à trouver des pistes dans les discussions des derniers jours) et pour tout dire je n'ai à peu près rien trouvé. Cependant j'aimerais faire part de quelques-unes de mes observations faites aujourd'hui.

L'Agitateur a fait part de son doute dans un court billet qui traite du faible rapport de force du mouvement étudiant face au gouvernement Charest.

En effet. Le rapport de force est pas immense. Et comme plusieurs autres, j'aurais tendance à évaluer nos chances à peu près à zéro. Idem pour le combat contre la corruption, mais ça c'était écrit dans le ciel. Enfin.

L'Agitateur écrit ceci et il ne se rend sans doute pas compte qu'il touche à un point vital de la lutte:
« Les caméras, les négociations institutionnalisées et les communications informationnelles (Facebook, Twitter, Youtube) n’ont rien de concret, hormis peut-être sur votre imaginaire. »

Notre société n'est pas bâtie sur du concret. Les rapports de classe et les rapports capitalistes sont basés sur des valeurs inventées de toutes pièces. Le système bancaire, les cycles de croissance et de décroissance, tout ça est basé sur des créations de notre imaginaire. Le capital lui-même est imaginaire. Les gestionnaires emploient plutôt le mot « virtuel », mais dans un certain sens, ça revient pas mal au même. Comme je l'ai expliqué dans le texte précédent, cette escroquerie quotidienne du pouvoir carbure à la légitimité, elle-même absolument immatérielle. Je pourrais disserter comme ça pendant des heures, notant le caractère également imaginaire de la Nation et des religions, mais on raterait le point principal qui est celui-ci: toute guerre contre une autorité qui possède quelque ascendant sur le peuple ne peut être en premier lieu que psychologique.

L'Agitateur a sans doute raison en disant que plusieurs des moyens de pression effectués - et ça vaut pour toutes les luttes - ne font pas un pli aux dirigeant-e-s, même si ça nous conforte nous. Je pense cependant que les plus grandes victoires ne seront pas matérielles, auxquelles l'amélioration de notre qualité de vie ne seront que d'agréables conséquences. Si jamais nous avons l'occasion de mettre les élites K.O., ce sera suite à un combat faisant partie du règne de l'imaginaire.

De manière plus terre-à-terre, cette guerre psychologique que nous nous livrons d'abord et avant tout à nous-mêmes passe certainement par des manifestations, entre autres. Pourquoi les militant-e-s parlent toujours "d'augmentation des moyens de pression"? Par un exercice conscient ou non (parce que c'est parfois, d'après moi, la marque d'une idéologie de lutte plus qu'une pratique pragmatique), illes mettent en pratique les principes d'une mise en scène de guerre psychologique, d'un build-up constitué de menaces vagues et terribles, comme quoi l'évènement qui suit sera plus difficile à gérer que le précédent. Les résultats varient selon le talent et la mobilisation de la communauté touchée.

lundi 3 octobre 2011

Quand le voisinage brûle.

Un incendie vient de se déclarer dans ce qui semble être le toit d'un immeuble abandonné sur le coin Cartier et Villeray, à Montréal. Possédant un mur mitoyen avec un édifice à trois étages et lui-même occupé par des habitants répartis dans quatre logements, son état était menaçant non pas seulement pour lui-même, mais aussi pour le voisinage. La densité de population du quartier Saint-Michel est par ailleurs très élevée.

Heureusement, la situation semble maintenant sous contrôle.

Mais qui sont les responsables de cet incendie qui aurait pu affecter toute une rue pendant des semaines, en plus de faire chier de manière irréversible les habitants de l'immeuble voisin? Les propriétaires, qui ont laissé leur édifice tomber en ruines sans s'inquiéter de la sécurité des voisin-e-s? La ville, qui ne fait pas assez pour s'assurer que nos immeubles restent aux normes? D'éventuel-le-s squatteurs/euses? Il serait un peu naïf de croire qu'un incendie déclaré dans un édifice abandonné est le fruit d'une malchance. Cet incident aurait certainement pu être évité.

Au-delà du match de ping-pong dans lequel pourraient s'affronter les personnes responsables, c'est aussi la question de l'accès au logement qui refait surface. Un immeuble à logements qui brûle, même vide, c'est un lieu d'habitation qui se perd.

Combien de temps, alors que nous sommes au milieu d'une crise du logement qui semble destinée à durer pour l'éternité, devrons-nous endurer l'insulte de cet édifice restant cruellement vide, avant que de dynamiques créateurs de richesse ou la ville le mettent finalement à terre? Combien de temps devrons-nous endurer l'insalubrité et la rareté de logements à peine abordables et la mesquinerie d'une élite qui n'a rien à foutre de nos milieux de vie?

dimanche 25 septembre 2011

moyens d'actions / mouvement anticorruption (1)

Quoi faire face à un gouvernement qui fait la sourde oreille face aux revendications populaires, portées ou non par des manifestant-e-s qui envahissent les rues? Dans cette série d'articles que je compte écrire, j'essaierai de me joindre au débat sur les moyens d'actions qui soutiendront la lutte contre le gouvernement corrompu. La première partie traitera de légitimité et du rôle des manifestations dans une lutte politique.

L'Équilibriste, afin de nous faire avancer, propose un plan d'action en plusieurs étapes et dont le coeur serait une grève sociale de trois jours. Il rejette en passant l'initiative d'organiser (à la va-vite, précise-t-il) des manifestations devant le bureau de Jean Charest à Montréal.

Si on jette un coup d'oeil aux principales luttes sociales des dernières années, la manifestation a cependant toujours fait partie de la lutte politique. Que ces mouvements aient été couronnés de succès ou non. Pourquoi? J'ai déjà défendu de manière très succincte l'utilité des manifestations ici même, alors que deux autres blogueurs/euses, soit Anne Archet et David Gendron, avaient mis en doute de manière tout à fait légitime le recours à ce moyen de pression. Les circonstances étaient différentes: c'était pour réagir à la marche annuelle du COBP. Je résume mes arguments:

1. Ce n'est pas parce que c'est permis que c'est nécessairement mauvais.
2. Une manifestation peut être un lieu de rencontre et de dialogue.
3. Une manifestation (même pacifique!) peut provoquer une perturbation temporaire du système, et donc peut servir de moyen de pression réel.

Ce à quoi j'ajoute une composante importante, qui est à la base de tout exercice d'établissement de pouvoir ou de renversement: la légitimation.

Le gouvernement "démocratique" typique, comme tout autre gouvernement cherchant le consentement, se nourrit presque exclusivement d'exercices de légitimation. Dans l'Ancien Régime, le roi cherchait la légitimité par son association avec une divinité, avec un ancêtre et parfois en simulant des pouvoirs thaumaturgiques[1]. Aujourd'hui, il est plutôt question d'élections, de consultations populaires et d'autres artifices. Tout ça est assimilable à des pièges à cons, bien entendu, mais ces exercices ont des effets tout à fait matériels sur l'état d'esprit des citoyen-ne-s. Combien de fois les politicien-ne-s, face au mécontentement, nous ont servi ces arguments:
"Les électeurs m'ont élu pour que je mette mon programme à exécution."
"La majorité silencieuse est de mon côté."
Et combien de fois les a-t-on cru-e-s?

Il n'est bien sûr pas question de recherche d'assentiment ici, ni de souveraineté populaire, de contrat social ou d'autre niaiserie inventée pour nous la faire fermer. Il est simplement question de recherche de légitimité. C'est en résumé le mot qu'il faut toujours avoir en tête.

Pour renverser les effets de ces exercices de légitimation, pour relâcher l'incroyable pression psychologique du pouvoir, il faut que la contestation bénéficie d'un soutien massif. Finalement, que son niveau de légitimité dépasse celui du gouvernement!

C'est cette légitimité nouvelle qui permet de passer à la vitesse supérieure. L'Équilibriste propose, consciemment ou pas, un moyen d'acquérir cette légitimité dans un billet de son blogue: "Qu’une vaste campagne visant à sensibiliser et mobiliser les faiseurs d’opinion publique (chroniqueurs, vedettes, personnalités) autour de l’organisation de la grève sociale. Car ce sont ces derniers qui auront la plus grande influence sur la masse."

Cela ressemble beaucoup, finalement, à une tentative de "révolution" par le haut. Ça m'apparaît complètement inintéressant. Au XXe siècle, la faiblesse des technologies de communication rendait difficile la transmission de messages entre citoyen-ne-s ordinaires. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Il n'est pas nécessaire de convaincre Mario Roy et Patrick Lagacé pour que les gens se mettent à penser quelque chose. Les faits nus, diffusés sur le net (ou plus traditionnellement sur des murs, dehors) et partagés massivement suffisent. Les gens se feront une idée après, avec l'aide de leur intelligence. Des gens qui n'ont pas l'impression d'être contrôlés vont plus profondément remettre les choses en question. Cette remise en question est essentielle pour que la légitimité vacille.

Les chroniqueurs/euses populaires, qui ont pour la plupart fait leur carrière en exploitant des lieux communs, ne sont pas des gens audacieux[2]. Je renonce à tenter de les convaincre, c'est inutile. Je pense qu'il faut seulement les mettre devant le fait accompli. Après, il faut pas s'inquiéter, ils vont suivre si c'est dans leur intérêt.

Ce ne sont par ailleurs pas des journalistes héroïques qui ont déclenché la révolte tunisienne, mais un gars qui s'est crissé en feu. Cette action désespérée a traduit un sentiment partagé par tous et toutes. Toutefois, la situation était différente, puisque le régime était déjà en crise de légitimité bien avant l'auto-immolation en question.

Comment donc parvenir à faire s'écrouler la légitimité déjà entamée du gouvernement de Jean Charest? Eh bien la première étape c'est... bien évidemment la manifestation et les pétitions! Le nombre évalué par les médias est lui-même secondaire. Ça, c'est pour le marketing.

Ce qui compte réellement, c'est l'expérience personnelle. Et voilà un aspect du combat qui est souvent mis de côté par les macro-activistes[3]. Il faut que les gens sentent INDIVIDUELLEMENT que malgré leurs efforts, ils n'ont pas été écoutés! Voilà pourquoi il faut selon moi réduire au maximum l'importance des grand-e-s porte-paroles du peuple et permettre au plus grand nombre d'agir. La manifestation est une action qui le permet en partie. 20 000 personnes qui manifestent, ça ne cause pas qu'un article dans La Presse: ce sont 20 000 expériences personnelles.

(À suivre)

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[1] Ça veut dire guérir du monde par magie.
[2] À part peut-être du monde comme Foglia.
[3] J'ai décidé de définir ainsi les activistes ou analystes qui n'ont pas de vision à petite échelle.

samedi 24 septembre 2011

Le mouvement du 24 septembre.

Le rassemblement d'aujourd'hui était finalement de taille modeste (le Journal de Québec parle de "quelques centaines" mais c'est complètement faux comme d'habitude - l'expression "quelques milliers" serait plus adéquate) mais incomparablement sympathique. Les organisateurs/trices, apparemment sans expérience (et c'est pas qu'un défaut) ont bien fait leur travail.

Il y avait un service d'ordre, mais il était quasi-absent, de même que la police. La foule était plutôt hétérogène: petites familles, jeunes, vieux et (hélas) beaucoup de militant-e-s nationalistes qui brandissaient des drapeaux derrière la scène, comme pour récupérer l'évènement. L'ambiance était festive et tranquille. Les discours ont été plutôt nombreux. Je déplore peut-être un peu l'absence de fil conducteur entre les déclarations des orateurs/trices: le lien entre leurs propos et la corruption du gouvernement était souvent très diffus. La radicalité de plusieurs monologues (par exemple celui de Dan Bigras) était également inversement proportionnelle aux moyens d'actions suggérés. Par exemple, on a à plusieurs reprises non pas exigé le départ consensuel de Charest, mais bien sa destitution directe par le peuple.

Néanmoins, cet élan d'optimisme a fait du bien et distribué beaucoup d'énergie, à défaut de faire peur aux principaux intéressés, c'est-à-dire les mafiosi qui nous gouvernent. L'équipe d'organisation a décidé de ne pas mener la foule comme des moutons, ce qu'on voit systématiquement à la grande marche corporatiste du 1er mai. Ça, c'est tout en leur honneur. Les invité-e-s ont également été bien choisi-e-s. Je dois avouer que j'ai toujours eu beaucoup de respect pour Armand Vaillancourt, malgré ses appels constants à la patrie[1], dont la fureur antiautoritaire trahit pourtant quotidiennement la substance. Dan Bigras est un autre homme vieillissant d'une espèce rare: celle qui aime les jeunes. Marie-Ève Rancourt, ce volcan, est le morceau qui nous reste de l'esprit de Seattle et du Sommet de Québec. Quant à François Yo Gourd, cette incarnation du fantastique et de l'absurde, eh bien il a fait comme d'habitude, c'est-à-dire du gros n'importe quoi plein de franchise et d'esprit.

Si ça reste de même, je continue d'aller à leurs rassemblements.

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[1] Cette idée dégueulasse, comme dirait Renaud.

Manif contre Charest

Elle se tiendra demain à 14h00 devant les bureaux de Charest au centre-ville de Montréal (770 Sherbrooke Ouest).

Le mouvement est certes réformiste, mais ses critiques en valent d'autres.

Les revendications sont énumérées dans le communiqué:

"Nous exigeons du premier ministre du Québec:
  1. de mettre sur pied une commission d'enquête sur la collusion et la corruption dans l'industrie de la construction;
  2. de mettre sur pied une commission chargée d'effectuer une réelle réforme des institutions démocratiques et du financement des partis politiques;
  3. de déclencher des élections générales;
  4. de démissionner."

Je préférerais changer le point 3. par "nous laisser déclarer l'anarchie". Les citoyen-ne-s à l'origine du communiqué n'ont pas l'air de comprendre que le problème est systémique. D'un autre côté, voilà qui rend l'initiative très sympathique:

"Le Mouvement du 24 septembre est un collectif citoyen non partisan s’étant formé de manière spontanée. Ce collectif ne possède pas de chef, ni de hiérarchie spécifique."

Pas mal, non? Maintenant, je ne sais pas du tout si ça risque de virer corpo d'être récupéré par des gens sans vergogne. On verra bien. Pour l'instant, rejoindre ce pôle de contestation me semble plus que nécessaire.

vendredi 23 septembre 2011

Club des ex et financement des universités.

Il est disponible en rediffusion sur le site de Radio-Canada.

Un ennui de programmation nous coupe le contenu à partir de la dixième minute environ. Ça recommence seulement au moment où les étudiant-e-s ont réussi à s'imposer, vers 24min50.

mercredi 21 septembre 2011

Loi et ordre conservateurs / Paola Ortiz

Leur loi omnibus encourageant la répression, ils peuvent bien se la fourrer dans leurs culs de tyrans. Ça marchera pas. La misère est la principale cause du crime. Les Conservateurs l'augmentent; peu importe la réponse policière, ça règlera jamais le problème.

Et j'ajouterais aussi qu'il manque des boulons dans la tête de M. Boisvenu. Il ne veut pas que les victimes soient protégées, il veut juste se venger. Sa fureur zélée est telle qu'il ne sait peut-être même pas qu'il se fait manipuler.

***

Ah oui, j'oubliais: des groupes communautaires appellent à l'action immédiate pour dénoncer la déportation de Paola Ortiz. Il est entre autres suggéré d'envoyer des lettres ou de téléphoner aux ministres responsables de son expulsion.

Nous avons jusqu'à vendredi pour empêcher cette citoyenne de Pointe-Saint-Charles de se faire renvoyer au Mexique avec ses deux enfants!

Je ne suis pas très optimiste de nature, mais tout de même, ça fait partie des petits combats qu'il faut mener pour rendre cette prison sociale plus habitable. De plus, je juge bien humblement que Mme Ortiz, ainsi que sa famille, ont eu leur lot de souffrances.

mardi 13 septembre 2011

Abus de pouvoir ordinaire (II)

Vous vous souvenez de ce vidéo? Eh bien elle tourne dans les mass médias maintenant depuis plusieurs jours. Je ne sais pas quel fil ont remonté les journalistes pour arriver à cette histoire, mais bon. Apparemment, l'individu ayant filmé la scène a été reçu en entrevue. Peut-être est-ce lui qui a avisé les journaux.

Lagacé a pris un gros cinq minutes de son temps pour écrire un article sur le sujet. Bon, en fait, je ne sais pas vraiment combien de temps ça lui a pris pour rédiger ça, je sais juste que ça me prend cinq minutes écrire quelque chose d'une qualité aussi minable.

L'auteur du blogue Catharsis répond à ce billet par une charge très insolente. Un texte à lire.

Je souhaite un prompt rétablissement aux flics qui ont dû souffrir d'un terrible choc nerveux après avoir violé une fois de plus les droits de la personne.

Le centre communautaire Adrianna

Il a brûlé...

Si vous avez des solutions au problème de la relocalisation du centre, gênez-vous pas pour proposer...

dimanche 11 septembre 2011

Appel de textes pour le prochain recueil

Note: ceci est une copie conforme du texte qu'on peut trouver sur le blogue Catharsis.

Au mois de mai 2011, SUBVERSIONS, le premier recueil de fiction du Bloc des auteur-e-s anarchistes de Montréal, a laissé déferler ses mots sur le monde. À partir de là, deux choix : lire ce tome 1 ou écrire pour le tome 2!
Claviers, plumes, crayons et dactylos libertaires, vous avez jusqu'au 31 octobre 2011 pour rédiger une fiction d'un maximum de 2500 mots, à paraître dans le deuxième
recueil SUBVERSIONS.
Fondé lors du 11e Salon du livre anarchiste de Montréal en 2010, le Bloc désire promouvoir les théories et les pratiques de l'anarchisme à travers la littérature.
En tant qu'auteur.e.s anarchistes, nous luttons pour une société égalitaire, verte, libre et autogérée, par la démocratie directe et l'action directe. La littérature anarchiste participe à cette lutte. Si vous ou vos textes de fiction prennent part à cette révolution, soumettez-nous vos écrits à l'adresse suivante : awb@daemonflower.com.
Bien que nous préférons un envoi électronique, vous pouvez soumettre votre
manuscrit par la poste à l'adresse suivante: Bloc des auteur-e-s anarchistes a/s
Librairie Insoumise, 2033 St-Laurent, Montréal (QC), H2X 2T3
Cette fois-ci, en plus de l'anglais et du français, les textes peuvent être rédigés en
espagnol et en italien.
Pour plus de détails sur l'écriture, la sélection et l'envoi des textes, visitez le site Web
du Bloc (http://awb.daemonflower.com) ou communiquez avec nous au
awb@daemonflower.com.
Le volubile possible est à nos portes! Ne reste qu'à l'écrire...

samedi 10 septembre 2011

L'Égypte se ferme un peu plus.

Impossible d'ici peu d'acheter un visa en arrivant à l'aéroport. À partir de ce moment-là, il faudra s'adresser au Consulat dans le pays d'origine pour pouvoir ensuite avoir le droit d'entrer en Égypte. Le gouvernement va donc réguler les entrées.

Abus de pouvoir ordinaire (07/09/2011)

Voici une courte séquence vidéo tournée le 7 septembre dernier et trouvée sur le blogue de Pwel.

dimanche 4 septembre 2011

L'Ancien Régime.

Le procès de Moubarak recommence demain. Plusieurs révolutionnaires réclament ardemment la peine de mort pour l'ex-leader. Celui-ci a en effet mené une répression populaire tout à fait impressionnante et sanglante qui fit, pendant l'hiver, plus de 800 morts et des milliers de blessé-e-s.

De l'aveu même d'un jeune Égyptien ce matin à la radio de SRC, le régime n'a pourtant pas totalement changé. Le peuple, oui. Mais jusqu'à quel point?

Devant cette formidable répression, les meurtres, les disparitions, la torture, une seule réponse permet un changement en profondeur. C'est d'agir avec plus d'humanité que ceux qui ont précédé. Je ne suis peut-être pas en mesure de comprendre en profondeur la colère du peuple égyptien: je n'ai pas perdu un frère ou une soeur au cours des six derniers mois et je n'ai été que légèrement atteint par la brutalité de mon État à moi. Mais ce dont je me rends compte, c'est du manque absolu de lucidité de beaucoup d'Égyptien-ne-s qui, souhaitant pourtant sincèrement que les choses ne soient plus jamais les mêmes, s'apprêtent à appuyer consciemment le remplacement d'un régime par un autre qui est exactement pareil. Les justifications seulement seront transformées (mais pour combien de temps?). L'armée dans les rues protège la population contre les criminels évadés qui ont volé des armes dans les postes de police. Un genre de milice surveille les étudiant-e-s des collèges pendant la période d'examens, avec une vigilance paranoïaque: on suspecte en effet les partisans du Raïs déchu de vouloir perturber. Plus récemment, on a décidé de ramener une vieille loi des années cinquante pour punir les anciens corrupteurs. Cette loi se nomme "la loi sur la trahison"[1].

Et maintenant, c'est l'histoire des appels à la peine de mort pour Moubarak qui défraie les manchettes. C'est au tour du peuple d'avoir à la bouche le goût du sang.

La peine de mort est une aberration: c'est l'arme des ignorant-e-s. Son utilisation dans une seule situation rend légitime la plupart des autres.

Or, le gouvernement de Moubarak était justement un tel régime de surveillance et de peur, qui appelait sans cesse à la mort. En appelant à l'exécution et à la purge, les Égyptien-ne-s concerné-e-s ne font que prouver à quel point illes ont bien assimilé les méthodes de l'ancien régime. Illes ont organisé une contestation sans figure dominante[2], centrée sur une organisation parfois complètement dépourvue de chefs, presque exemplaire. Et pourtant plusieurs attendent aujourd'hui bêtement, la gueule ouverte comme des oisillons quêtant de la nourriture à leur génitrice, que les autorités qui les ont autrefois condamnés punissent tout aussi bêtement le vieux tyran. En refusant de voir que ce sont les institutions coercitives qui ont permis à Moubarak de blesser tant de monde, en refusant de voir que c'est le pouvoir dans sa globalité qui est responsable de leurs souffrances, une partie du peuple condamne l'Égypte à retourner dans le même cycle de servitude et de contraintes.

Le peuple n'a rien à attendre de la peine de mort, ni des grands procès pompeux. Il n'a rien à attendre des grandes institutions. C'est seulement en changeant sa vie quotidienne en profondeur[3], en modifiant son rapport à l'autorité, à la peur et à l'obéissance qu'il deviendra fort et qu'il se mettra à l'abri des grandes crapules.

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[1] Voilà ce que dit Al-Ahram là-dessus: «Le but de cette loi n° 344 de 1952, modifiée par la loi n° 173 de l’année 1953, a établi plusieurs sanctions : privation du condamné de la fonction publique, de l’adhésion au Parlement, du droit de vote, de l’affiliation aux partis politiques pour au moins 5 ans. Les sanctions peuvent aboutir à la privation de la nationalité égyptienne. Selon cette loi, le tribunal de traîtrise est composé d’une majorité de militaires et d’un petit nombre de magistrats. [...] Baheyeddine Hassan, directeur du Centre du Caire pour les études des droits de l’homme, assure que la loi sur la traîtrise qui fut appliquée dans les années 1950 a mené à l’absence de la démocratie en politique. "Elle a contribué ainsi à l’abolition des partis politiques et à la nationalisation de la presse, des syndicats et des ONG. Elle commencera par les responsables de l’ancien régime et finira par punir les jeunes de la révolution du 25 janvier ".»
[2] Notez l'utilisation du singulier. Il y eut cependant énormément de personnalités publiques qui ont été considérées comme des meneurs, notamment des leaders religieux.
[3] Nidal Tahrir a bien expliqué bien comment l'organisation contestataire peut être un outil réellement révolutionnaire: « nous allons essayer de faire en sorte que les comités qui ont été formés pour protéger et sécuriser les rues, deviennent plus fort et de les transformer par la suite en véritables conseils populaires. »