lundi 4 janvier 2010

Qui vit au-dessus de ses moyens?

Des économistes de droite (c'est peut-être un pléonasme), dont deux signataires du manifeste pour un Québec Lucide, ont pointé le gouvernement du doigt en disant que le Québec vivait au-dessus de ses moyens. Conclusion chez André Pratte: il faut baisser les impôts... afin de permettre aux riches de vivre au-dessus de nos moyens.

Je sais que je réagis un peu sur le tard, mais quand j'ai entendu pour la première fois parler de ce rapport en décembre j'étais trop ahuri (et fatigué) pour pouvoir réfléchir.

Car il y a dans la logique des éditorialistes de droite du Québec plusieurs choses que je ne comprends pas. Par exemple: "favorisons le dynamisme du système de santé public en le mettant en compétition avec un système de santé privé". Comment s'articulerait cette compétition? Pour quelles raisons le système de santé public tenterait-il d'arracher la clientèle du système de santé privé? Par fierté, tout simplement?

Il y a aussi le sympathique "nous manquons de moyens, donc laissons les médecins travailler au privé". Il me semble que justement, c'est en période de pénurie et quand les moyens nous manquent qu'il faut rationaliser les services. Cette idée saugrenue, c'est comme si pendant la Deuxième Guerre Mondiale, on avait dit à la population: "Désolés chers citoyens, mais la pénurie de sucre nous force à laisser agir la loi de l'offre et de la demande pour gérer les prix. Si on continue de rationner vos grand-mères vont mourir."

Ce que je n'arrive pas à comprendre, d'une manière plus générale en économie, c'est comment on arrive à déformer la réalité au point où un investissement virtuel compte plus que le bien matériel. Pourquoi dit-on qu'ouvrir une usine de gugusses inutiles est bon pour une population? La piscine intérieure du riche, même si elle est creusée et nettoyée par des employé-e-s, n'a de valeur intrinsèque que dans sa fonction de piscine. Comment se fait-il donc qu'on puisse voir dans sa création un acte de jouissance collective (c'est-à-dire une activité économique favorisant la croissance)? Je ne vois pas pourquoi j'aurais des raisons de jouir, j'irai jamais me baigner dans cette hostie de piscine...


***

Quand on dit que le Québec vit au-dessus de ses moyens, ce n'est jamais pour accuser les gens d'acheter trop de Hummers et d'écrans plats, ou de manger trop de viande. C'est pour accuser les gens de mettre trop d'argent dans les bibliothèques, les écoles, les autobus et les hôpitaux.

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