dimanche 11 mai 2008

Les groupes communautaires : sous-traitance et exploitation secrète.

Les groupes communautaires rendent plusieurs services devenus essentiels à un large pan de la population. Les préjugés persistent pourtant : selon Alain Dubuc, Guy Laliberté et Réjean Breton, les groupes communautaires sont des immobilistes (un néologisme signé Power Corp.). Autrement dit, ces organismes payés par les taxes, en tant que forces de l’inertie, ne savent que contester le succès et empêchent le Québec de progresser.

Cette critique qu’on entend de plus en plus souvent est absurde. On accuse les dissident-e-s à leurs projets d’être déconnectés de la réalité. Mais on veut construire un casino géant sur une île artificielle, à côté d’un quartier pauvre. On aimerait bien savoir à quelle réalité les "créateurs de richesse" sont connectés.

Les groupes « parias » communautaires sont connectés à une réalité de plus en plus claire : on les traite comme des esclaves. À Montréal par exemple, alors que le financement n’est pas augmenté dans plusieurs secteurs de la vie communautaire, la ville, grande promotrice des forces du mouvement, demande aux organismes sans but lucratif de décharger la mairie de ses services : c’est alors un nouveau type de PPP qui s’organise, dans le cadre duquel des employé-e-s sous-payés remplacent les fonctionnaires et les élus.

L’exemple des Éco-Quartiers est un des plus frappant. En quelques décennies, il en a poussé plusieurs dans la région métropolitaine. Sur place, on sous-paie des travailleurs/euses afin de s'occuper de la gestion des bacs de récupération, de l’information générale sur les règlements municipaux, de la visite annuelle des commerces, et depuis peu, de la vérification des mesures de sécurité contre les incendies. Le salaire moyen d’un-e employé-e d’Éco-Quartier : autour de 12$ l’heure. Au bout de 50 semaines de travail, son revenu est à peine au-dessus du seuil de pauvreté. Pourtant, plusieurs des travailleurs et travailleuses des Éco-Quartiers ont un baccalauréat en environnement, en biologie, ou un diplôme d’études supérieures dans les sciences sociales, et assurent des services que les institutions régulières et reconnues ne sont plus en mesure d’assurer en raison de la bureaucratie écrasante et de l’absence de volonté des administrations municipales.

Le but de la Ville de Montréal, en ayant de plus en plus recours aux groupes communautaires pour faire les jobs sales, est de réduire les coûts du système, quitte à jeter dans la pauvreté des employé-e-s qui, débordé-e-s et méprisé-e-s par des médias mesquins, continuent souvent de faire leur travail par simple sens du devoir.

Les entreprises privées arrivent parfois tout de même à soumettre des sommes plus basses afin de prétendre offrir les mêmes services que les groupes communautaires, entre autres dans la gestion des Éco-Centres, qui s’occupent, par exemple, de la récupération des peintures et huiles usées. Les témoignages sont nombreux à expliquer les raisons de cette gestion « supérieure » : vol de matériel appartenant à la ville, non-respect des termes du contrat, absence d’un service constant et de qualité, etc.

La réalité dont nous sommes « déconnecté-e-s », elle est là, elle est claire : le gouvernement se sert des groupes communautaires aujourd’hui comme il se servait du clergé autrefois, c’est-à-dire comme pépinière à services de qualité moyenne à faible coût – on se souvient comment l’Église assurait, autrefois, le maintien du système de santé – et les journalistes et hommes d’affaires s’en servent comme exutoires devant la médiocrité de notre société dont ils sont beaucoup plus responsables que les quasi-bénévoles qui organisent, depuis longtemps dans l’ombre, la vie commune dans les HLM, le recyclage et le compostage à l’échelle municipale, tout en assurant le rôle d’intermédiaires partout où la ville, par dédain, ne veut plus mettre les pieds.

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